CFDRM > Dossiers > CV
Alain cabello > Massages thanato-morbides
dans la carte-postale
Page créée le : samedi 3 août 2013, terminée le
: mercredi 7 août 2013, 19:28, dernière
modification : jeudi 22 août
2013, à 22:27
Mots clefs : massages
thanato-morbides ; praticien ; massage ; massage
chtonien ; masseur ; retour
aux origines ; table
de massage.
Noms propres : CFDRM de Paris ; Alain
Cabello-Mosnier ; Charon
; Achéron
; Cocyte
; Léthé
; Orphé
; Eurydice
; Dédale
; Ariane
; Minos ; Serre
; Olive ; A. Hitler
; Lennie Riefenstahl
; Ésope
; Jean de la Fontaine
; Sénèque
; Lucilius ; Commode ; Althusser ; Hélène ; Eros ; Thanatos ; B. Cartland
; Freud ; Charybde
; Scylla
; Poséidon
; Gaïa
; Zeus
; Circé
; Onan ; Juda ; Jésus ; Dieu ; A.
Duperron ; Eden ; La Linea
; Zend Avesta.
Dossier associé :
Article précédant : Lecture
d'un Bas-relief du Musée du Pirée,
2 août 2013 – Article suivant
: Démystification
systématique de la charge corporelle en massage
français
|
C'est Denis Hüe, directeur de l'UFR ALC et professeur de langue et de littérature du Moyen Âge et de la Renaissance qui nous fait remarquer le Mercredi 5 juillet 2017 que "le bilinguisme (français/anglais) ne peut que renvoyer aux Alliés, et implique une participation des Américains : la carte date d'entre fin 17 et 18, Another pill for kaiser Bill "Une autre pilule pour kaiser Bill" en dehors du jeu de rimes, renvoie à la pilule comme embarras, inconfort... Qu'on pourrait traduire par "un nouveau souci pour Bill" : l'arrivée des Américains en guerre." Que faut-il comprendre de plus par là ? Que notre molosse à grosses poignes est ce qu'il mérite de mieux ou au contraire, que sa présence est une des douceurs qu'il réserve à ses hôtes ?
Poursuivons notre petit inventaire des massages thanato-morbides avec la carte-postale suivante, toujours allemande, mais il faut savoir que ce pays, au-delà d'avoir été très raillé pour sa brutalité, cause de désordres considérables dans l'histoire récente contemporaine de ce média, n'en reste pas moins très en avance pour tout ce qui touche au corps, au naturisme, au massage qui sont des pratiques qui viennent sourcer régulièrement auprès de cette Grèce qui les inspirent tant. Sur la première carte que nous avons étudiée le bourreau était seul posant avec ses outils, ici le binome s'installe dans une dialectique Thanato-morbide. Le massé arbore sur le premier registre un regard circonspect, un quart d'heure est passé sur le second et notre homme est déjà effrayé par les effets spectaculaires de sa fonte musculaire qui s'aggrave sur le troisième registre au même rythme que se sourcils poursuivent leur ascension. Le quatrième plan ne fait que confirmer
les inquiétudes apparemment fondée
de notre malheureux massé
réduit à l'état de baguette
de pain sur laquelle ne subsiste qu'une désespérante
serviette
dissimulant les fesses d'un massé devenu La Linea L'atteinte est ici corporelle et chtonienne, elle s'exprime dans le corps devenu bâton, symbole de violence, et dans la scène elle-même du masseur dubitatif qui enferme à la fois l'erreur professionnelle et la consternation du massé. Le bâton est une branche mal-traitée à laquelle on a retiré des branches plus petites, des feuilles, on l'a taillée, mise à dimension. La personne massée fut ici mise à la dimension de l'incompétence d'un homme qui n'a pas su s'arrêter avant. Sur la vignette ci-dessous je vous communique l'équivalent féminin.
Sur le même registre nous passons à cette vue française mettant en scène un massage amincissant tout-à-fait réussi puisque le massé a carrément disparu, légendée "Succès complet". Comme quoi, un massage complet est toujours déconseillé... Notre
boxeur allemand la promettait, le suivant montrait sa
capacité à mener au désastre prévu
sa séance par son manque de discernement, mais
là nous sommes face à l'efficacité
française, tout doit disparaître. La violence
est bien sûr supposée mais l'humour
n'est qu'un paravent que le réel rend tragique.
Nous n'en arrivons pas moins à la négation
de la personne
effacée de l'existence par son masseur. Je vous
rappelle les cas de ces masseurs ayant exécuté
leur massé(e) comme l'Empereur Commode
le fut, étouffé
par le sien Ce que le massage interroge dans ces cas d'école c'est comment un ductus, un déroulé technique peut passer du dialogue au duel morbide en empruntant la même chaîne, sans qu'il y ait rupture ? Le masseur est sollicité pour vaincre une tension, une douleur, il est l'élément actif qui se retourne contre son sujet pour nuire non pas à ses noeuds de tension mais au corps qui les abrite. En réalité, tout massage, invariablement contient cette dichotomie, l'homme est conscience et inconscience, le couple massé est le rejeu de cette symétrie structurelle qui contient une gigantesque construction faite de rêve, de technique, de projection mais toujours, toujours cette part d'erreur systémique, un game over codé en chacun d'entre-nous. Concernant la surcharge pondérale plus marquée sur cette vue, le thanato-dialogue est ici double, une obésité morbide mettant l'homme en situation de décès en lien avec sa prise de rendez-vous, (c'est le but du massage amincissant) et le face-à-face avec le praticien au visage de boucher aboutissant à ce succès complet par palper/rouler qui conduit à la disparition des graisses superflues, mais là c'est le patient lui-même devait être superflu aux yeux de notre praticien puisqu'il fini par gommer tout-à-fait son massé de sa table de massage. L'embonpoint serait aussi un sujet à traiter tant il est large. Sa stigmatisation sociale pour non conformité aux dogmes de la beauté et de la jeunesse que nous exaltons toujours davantage n'y est pas pour rien. Dans la carte-postale elle devient tantôt l'objet du crime, tantôt l'arme elle-même selon qu'elle concerne le/la massé(e) ou le/la masseur(se). Sur le patient elle est ce qu'il faut combattre soit par le massage soit par la légende ou bien encore par le regard décomposé du masseur lorsqu'il voit l'énormité du travail qu'il a à faire ou que sa cliente n'est pas la fille mais la mère. Sur le ou la praticien(ne) est l'image de sa tyrannie, de son absence de complaisance et la projection par comparaison du calvaire que l'on va vivre.
Vous remarquerez que le massage induit toujours un dialogue, une dualité qui s'exprime par la parité comme le préfixe de ces termes l'évoque, il n'y a jamais de témoin et c'est ce qui rend la gravure suivante intéressante puisqu'elle implique la présence d'un tiers, le soleil. Notre bel ami est celui de toujours des vivants, les espèces à naître comme les morts n'en bénéficient pas ou plus, son crédit est donc important et bien, même lui vient justifier notre inquiétude. Il nous restitue par sa jaune rondeur tous les éléments d'expressions du visage indiquant l'empathie la plus sincère, les sourcils relevés, les yeux ronds et écarquillés et la bouche béate en un oh ! de compassion. Visiblement le souci du soleil n'est pas sans fondement puisque le principal intéressé, pourtant de bonne constitution, semble souffrir le martyre sous les coups consciencieux de son praticien. Ses poings refermés et repliés contre lui comme un gros bébé plus que mature ainsi que sa tête déformée par la douleur en témoignent allègrement. Ce qui est formidable dans ces runes de mort disséminées partout entre rire et couleur c'est que même si c'est massif, que ça existe depuis toujours, on lui cherche malgré tout des circonstances atténuantes qui confinent à l'aveuglement, une douleur crayonnée est toujours moindre qu'une douleur peinte et leurs supports nous protègent du réel comme autant de filtres qui édulcolorent celle que l'on connaît tous. Lorsque le trait est grossi on préfère le suivre comme un joueur de flûte et se focaliser sur ce qui permet d'en rire même s'il nous mène collectivement à la noyade, nous ne voulons surtout pas souhaiter y trouver l'ombre de Thanatos. La voir est une conséquence, la trouver est une perversion car elle signifie l'avoir chercher. Ce qui m'intéresse ici c'est la première des manifestations de mort qui moi me saute aux yeux en la présence de la sueur. Inexorable goutte-à-goutte chargé de toxines et symbole d'effort. Il ne s'agit pas là de reprocher quoi que ce soit à ce mécanisme naturel, complexe et judicieux, voire érotique, mais de l'isoler dans le cadre qui nous est proposé. La transpiration contient sa part de morbidité, d'ailleurs, physiologiquement, nous savons que le sel qu'elle laisse sur la peau est de nature à l'assécher, mais ici, chez cet homme, si elle découle bien de l'effort qu'il produit, elle devient thanato-efficiente par un autre canal et se transmet à notre homme comme le marque son visage. Le canal dont je vous parle est celui qui conduit un groupe de mouvements masso-orientés visant à détendre à devenir douloureux sans que cela soit forcément nécessaire. Notre carte ne s'est pas construite autour du geste mesuré, professionnel et nécessaire. Elle illustre l'obstination sinon bornée en tout cas sans empathie pour le patient, la raison de sa venue est son seul objectif. D'ailleurs, de façon systémique l'inquiétude nous contamine ; nous sommes malgré nous un système qui se croit indépendant et autonome, pense qu'il ne fait que regarder un autre système inerte qu'il contrôle alors qu'en réalité, il y participe malgré tout de façon active et inconsciente et en constitue même une pièce dynamique, parmi d'autres, dans un méta-système déjà existant. C'est souvent le cas des systèmes qui en contiennent d'autres, ils pensent être les derniers de la chaîne à être les seuls à comprendre ce pourquoi ils ont été fait, et la réalité profonde de ce qu'ils surveillent, c'est-à-dire superviser ceux d'en dessous, alors qu'en fait, ils sont à leur tour étudiés par d'autres qui eux-même le sont par des systèmes encore plus vastes. Parfois cette étude ne concerne d'ailleurs qu'une partie seulement du sujet objet de leurs analyses comme par exemple cette carte-postale qui ne peut pas être que rigolotte, elle contient, malgré elle une part d'histoire, de vérité, d'humour, de technique indépendamment de sa finalité qui est d'être une envoyée postale destinée à faire sourire. Moi ce qui m'intéresse c'est la séquence d'après, une fois que tous ces mécanismes ont fonctionné, qu'ils se sont déclenchés l'un après l'autre, de les réduire à la flamme de la question et voir ce qu'elle devient après avoir méthodiquement été segmentée par l'esprit de déduction. La mort est ici partout et personne ne la voit justement parce que nous pensons assister à une séance de massage par nature inoffensive, systématiquement inoffensive, on se le dit, on se le répète, ce n'est là que le trait et rien que le trait que convoque l'artiste à la seule volonté d'amuser le spectateur. C'est aussi simple que cela, le vivant à besoin de hiérarchiser l'importance de ses inquiétudes, celles constituant un réel danger et celles ne faisant que les simuler pour en rire.
Ici c'est le thème de l'infidélité qu'il serait intéressant d'aborder sur le registre Thanato-morbide parce qu'il amorce l'autre grand groupe thanatoïde qu'est la place de la sexualité en massage et son corollaire, la prostitution. Cette prise parait très sage au premier abord, la dame est assise, habillée on ne peut mieux, les apparences sont sauves, nous n'avons rien à lui reprocher à ceci prêt que les écrits dont nous disposons disent tout le contraire. « Le massage est très sain dis-tu ! Pour les deux sexes. Massons-nous ensemble veux-tu ? Belle maîtresse. » Ici le massage est central on parle bien de toucher élaboré pourtant, il s'agit de retourner une conversation, "tu dis que c'est bon pour les deux sexes" ce qui implique une conversation antérieure dont on n'a pas la teneur, nous ne disposons que de l'affirmation reprise par l'interlocuteur afin d'y ajouter sa propre déduction donc, "massons-nous", entendez de façon friponne que le "Belle maîtresse" vient confirmer. Il ne s'agit pas là de relaxation technique, on ne parle pas de masseuse mais bien de maîtresse ce qui sous-entend "mari ou femme trompés". L'adultère reste un crime en communauté, car il ne s'agit pas de seulement attenter aux partenaires de vie de part et d'autre des protagonistes mais ils s'attentent à eux-même ainsi qu'à leur celui ou celle qui personnifie l'escapade. La tromperie est l'alphabet du mensonge qui est à la fois un pêché de religion et un suicide de l'éthique ou plutôt devrais-je écrire, « la tromperie est l'alphabet du mensonge qui est à la fois un pêché de religion pour les croyants et un suicide de l'éthique pour les hâtés laïcards. » Car il s'agit de construire un monde fictif et parallèle à celui que l'on a bâti avec la bénédiction sociale de son groupe d'appartenance. Ce monde là vit dans le magnétisme du premier comme la résultante d'une nouvelle chance qu'on s'octroi en s'affranchissant de toutes les règles auxquelles on adhère soi-même et que l'on aimerait pas voir bafouées par son concubin. Partant de la vie impossible que l'on pensé mener avec l'autre on s'autorise d'y remédier en s'offrant un "amour" qui deviendrait tout d'un coup possible en le fondant sur des règles que ne valident aucun ordre. L'infidélité est l'empire des ombres. Si le statut d'amant ou de maîtresse amuse c'est parce qu'il se fait au détriment de quelqu'un d'autre que soi. La personne mariée trompe l'autre, s'arroge de jouer à sa convenance avec qui lui plait en s'appropriant le caractère-même de la relation qu'il tisse puisque tout est fait pour rester invisible et mettre son nouvel amour à sa disposition le temps que l'on accepte de lui accorder, c'est de l'égoïsme méchant que la caricature dévore. La carte-postale ne se prive pas d'en jouer parce qu'elle croit ne mouvoir que des individus fait de mines de plomb et de coups de pinceaux rigolards. Elle est l'homme au beau rôle ou femme légère, soit frivole, soit masseuse afin d'ajouter du piquant. La maîtresse élevée comme un pendant d'épouse reste une charge qui double la peine alors que la "maîtresse-masseuse, versus putain" n'est plus que la dépouille opime d'une femme que l'on pare des attributs sexuels de l'homme, elle est une femme devenue homme puisque réduite à son plaisir le confinant à une homosexualité de forme. Alors bien sûr le crime est caricatural mais un meurtre de dessin reste la réactivation des mécanismes sociaux sur lesquels on insistent bien pour faire rire. La masseuse ou masseur est une maîtresse ou amant facile que l'on entretient à bon compte puisqu'elle se rémunaire à la séance ou, comme l'on dit de façon grivoise, en nature, ce qui renvoie aux premiers mécanismes fins de la prostitution plus ou moins formulés qui est l'autre versant pervers de la mise à disposition simplifiée de l'autre. La cage dorée de la sexualité dispose donc d'un pan que représente le mariage, d'un second occupé par la maîtresse, un troisième par la masseuse et pour refermer le tout sur ce petit monde humain, de la putain.
Ci-dessous je vous propose un groupe de cartes-postales autour de la maîtresse-masseuse ou de l'amant-masseur. Rapidement j'indiquerai que la fidélité est une des dernières formes de dictature politique imposés comme régime parfait de la nuptialité. Mon opinion est que l'esprit doit pouvoir se saisir convenablement de ces thèmes en discuter profondément dans le couple.
Peut-être pourrais-je terminer par cette carte illustrant l'épuisement et la sueur commune de nos deux individus ? Voilà, la prestation se termine et visiblement les deux sont exténués tout en partageant les grands items des massages thanato-morbides qui sont tous là ou presque. L'avachissement, l'abattement, la solitude, l'incompréhension de part et d'autre. Commençons par la légende de la carte n° VI, « Et quand le massage est finit, On se sent jeune et rafraîchi. », rien n'est moins sûr car le propos contient sa part de toxicité en se superposant avec le cliché, visiblement ce n'est pas la fraîcheur qui prime ici mais plutôt l'épuisement, voir, la dépression. Malheureusement le CFDRM de Paris n'a référencé que trois photos sur les six que semble compter cette série si l'on part du principe que celle-ci est par déduction la dernière. Il n'en possède aucune mais nous voyons l'intérêt d'une telle initiative visant à numériser celles qui sont acquises et récupérer au gré du web celles qui circulent. Le massé reste amorphe, voûté à la décente de la table de massage, les épaules tombante, sa tête est baissée, ses yeux sont clôt et il reste toujours aussi rondelet qu'il l'était au début. Le masseur quant à lui s'appuie péniblement sur la même table avec un poing encore rougi par ses activités pour le moins vigoureuses, d'ailleurs, la carnation de la peau cramoisie contient en germe l'expression de tissus malmenés. Il porte la main gauche à son front ce qui induit une volonté d'ombrager ses yeux par un geste qui apaise. La transpiration est également convoquée chez nos deux protagonistes avec la dimension thanato-morbide que nous avons déjà parcourus. Regardez comme l'absence de communication est là encore flagrante, je crois que nous avons le fil rouge de notre sujet, ce qui relie ces scènes destructrices jusque dans leurs fondement, ce n'est pas la violence induite des comportements mais l'absence d'affecte, d'infra dialogue implicite, par des mouvements comprit. Chacun est dans sa sphère et fait ce qu'il a à faire, trimer pour l'un, souffrir pour l'autre.
J'auras donc subrepticement abordé ici et de façon sans doute encore hésitante cette prise morbide à laquelle rien n'échappe, pas-même la carte-postale caricaturale sachant que je perçois bien que je pourrais allez beaucoup plus loin dans le développement, j'ai juste la sensation d'avoir fournie ici une base de travail. Ce papier me donne l'impression d'être devenu un simple croquis au fusain jeté sur un mur par un peintre enfermé dans la passion de son sujet mais ce n'est pas un tableau pour autant, tout juste une esquisse. Freud nous dit que le mental humain se structure autour ce double embranchement que sont la pulsion de vie et celle de la mort, entre le l'éros et thanatos ; personne ne peut échapper à cela. Si tel est le cas, alors une séance de massage devient forcément une caisse de résonance de ces doubles influences. La question est comment les cerner, les expliquer, les commenter ? Vous
connaissez le mythe Grec de Charybde
Je ne pense pas que j'aimerais que l'on dise de moi que je suis un iconoclaste du massage, je me poserais davantage comme un orthodoxe du geste maîtrisé, j'aime les symboles qui l'anime mais c'est la pompe qui me dérange dans ce qu'elle a d'usurpant. Paraître professionnel n'est pas l'être, c'est par l'étude, par le texte que l'on peut y parvenir. La mort, ici, m'y a aidé.
– Profil facebook
de :
Alain
Cabello |
|