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TITRE : Est à votre disposition Rome au siècle d'Auguste
ou Voyage d'un Gaulois à Rome à l'époque du règne d'Auguste et pendant une partie du règne de Tibère, précédé d'une description de Rome aux époques d'Auguste et de Tibère.
En quatre volumes, celui qui nous intéresse ici est le tome 1. Lettre XII page 322.

AUTEUR : Charles Dézobry.

ÉDITEUR :  Adrien Delahaye Et Emile Lecrosnier

Date d'édition : tome 1 et 2, 1846 ; tome 3 et 4, 1847.

Rééditions : 1835 1ère ed.,

Lieu d'impression : France.

LANGUE : français

FORMAT : quatre volumes complets, in-8°, 21,9 * 14cm. Vol.1 : XVI + 508p.; Vol.2 : IVp., 461p., 1feuillet (verso paginé VI), 5 planches hors texte ; Vol.3 : IVp., 560p., 1 feuillet (verso paginé VI), 1 f., ; Vol.4 : 1 faux-titre, 1 titre IVp., 440p., 1 feuillet (verso paginé VI), 1 f..

Type : Livres en quatre volumes, complets.

ISBN : aucun

Droits : domaine public

Crédit photographique : Le CFDRM.

Identifiant : http://www.cfdrm.fr

Numéro d'archives :

RELIURE : demi basane chagrinée aubergine ; dos à 4 nerfs ornés de pointillés dorés, 3 caissons à froid ornés de fleurons dorés, titres et tomaisons dorés soulignés de filets dorés, doubles filets dorés en têtes, triples filets dorés et 2 filets de pointillés dorés en queues. Reliures en bon état (coiffes inférieures légèrement frottées)

ILLUSTRATIONS : oui, gravures et planches dépliantes, Vol.1 : figures in texte, 7 planches hors texte et 3 plans hors texte dont 1grand dépliant et 2 sur doubles pages ; Vol.2 : 1 faux-titre, 1 titre, 1 feuillet, 5 planches hors texte ; Vol.3 : 1 faux-titre, 1titre, 1 feuillet (verso paginé VI), 1f., figures in texte, 2 planches hors texte, 2 cartes hors texte dont 1 dépliante couleurs et 1 sur double page; Vol.4 : 1faux-titre, 1titre, 1 feuillet (verso paginé VI), 1 f., 2 planches hors texte.

ETAT : bon état, pâles rousseurs (un peu plus marquées dans le 4è volume), petite déchirure au grand plan du 1er volume avec ruban adhésif; cachets d'ex-libris.

BIOGRAPHIE & THÈME : Histoire.

POIDS :

Description :

Commentaires : Voir texte associé ci-dessous

Description archéologique et de la société romaine, sous forme épistolaire. Mention de nouvelle édition "revue, augmentée et ornée d'un grand plan et de vues de Rome antique" (1ère parution en 1835) : édition "très améliorée", après "une révision complète, qui dura 11 ans" (Pierre Larousse). Le grand ouvrage de l'érudit, qui voulait faire pour Rome l'évocation animée qu'avait faite Barthélémy pour la Grèce, avec son "jeune Anacharsis Fiche technique".

Je rappelle que le texte est repris dans Le Magasin pittoresque, 4eme année de 1836 de Google-livres.

Fiche de repérage (mots clef) : à compléter

Alipiles, épileurs, masseurs, strigile, oigneurs, friction(s), frotter, aliptes, masse, presser

TDM : Traite ou emploie des termes liés au massage, oui (Extrait  issu de Google-livres, tome 1 de la première édition de 1835 page 225) :
"
Au sortir de la cuve ou du sudatoire, le baigneur s'étend sur une espèce de lit de repos, et un jeune masseur (ce sont des enfans, des eunuques ou même des femmes qui remplissent ces fonctions, surtout pour ceux qui ont des esclaves) ; un masseur, dis-je, commence par lui presser tout le corps, par le retourner, et quand les membres sont devenus souples et flexibles, il fait craquer les articulations sans effort, il masse, il pétrit pour ainsi dire la chair sans faire éprouver la plus légère douleur. Ensuite il passe aux frictions : la main armée d'un Strigile, grattoir de corne ou d'ivoire, ou d'un métal plus ou moins précieux, creusé en cuillère et cintré de manière à épouser un peu la rotondité des membres, il frotte vivement la peau, et détache toutes les impuretés que la transpiration a pu y faire amasser. Ces frictions durent assez long-temps, et il faut un peu d'habitude pour qu'elles ne vous semblent pas douloureuses. Puis vient la dépilation des aisselles, que l'Alipile ou le Parfumeur pratiquent soit au moyen de petites pinces, soit à l'aide d'un onguent composé de graine de saule noir attierain, avec égal poids de litharge. Cette opération terminée, le patient est frotté légèrement, d'abord avec un liniment de saindoux et d'ellébore blanc, qui a la vertu de faire disparaître les démangeaisons et les échauboulures puis avec des huiles et des essences parfumées contenues dans de petites ampoules de corne de taureau ou de rhinocéros. On l'essuie ensuite avec des étoffes de lin, ou d'une laine fine et douce, et tout est fini. Alors il s'enveloppe dans une gausape d'écarlate, manteau bien chaud ; ses esclaves viennent l'enlever, le mettent dans une litière fermée, et le rapportent chez lui : voilà pour les riches.

Ou bien d'une autre, plus économique encore, qu'ils s'administrent eux-mêmes, en s'aidant des murailles, contre Lesquelles ils se frottent les parties du corps que leurs mains ne sauraient atteindre facilement ; c'est assez pour ces petits plébéiens, qui ne sont pas, en général, d'une propreté fort recherchée, et ont pour habitude de se moucher sur le bras.

On se prépare aux frictions par des jeux et des amusemens violens, qui provoquent une sueur abondante : les uns s'exercent à la lutte, ou balancent leurs bras chargés de masses de plomb ; les autres jouent à la paume ; d'autres, les mains liés, montrent leur adresse à ramasser des anneaux, ou bien, mettant un genou en terre, se renversent en arrière, jusqu'à ce qu'ils touchent avec leur tète l'extrémité de leurs pieds.".

Les pauvres se contentent d'une simple friction avec la main..."

– Il semblerait qu'il y ait une mention à la Lettre XXVIIIe Les parasites page 47 où il nomme plusieurs professions "... le gardeur d'habits dans les bains, le frictionneur, l'épileur, le masseur, le parfumeur,..." Google.

Intérêt du masso-contenu :

Restitution de texte : p Lire (Partielle)

Livre en ligne sur : Google-livres, tome 1 de la première édition de 1835 page 225.

Provenance : France

Incorporation : 2008

Accès à l'emprunt : non, à consulter sur place, (Argus de recherche 850€).

Statut de l'ouvrage : don

Reconnaissance associative : Ce livre appartenait à la bibliothèque Alain Cabello.

 

Restitution de texte

 

 

Retranscription de Charles Dézobry

LETTRE XII : LES BAINS PRIVÉS ET LES BAINS PUBLICS
Page 322 tome 1.
Par Charles Dézobry, mise en page bénévole par Alain Cabello pour le CFDRM. L'ouvrage est bien sûr consultable à la bibliothèque du CFDRM.

Mots clefs : masseurs, frictions, pétrir, frotter, frictionneur , assouplir, Alipiles, Strigiles, aliptes, oigneurs, frictionneur, Capsa, Capsaires, Apodytère, Palestres, Sphaeristère, Eleothése, Unctoire, Hypocaustum, Laconinum, Sudatoire, Caldaire, Tepidaire, Frigidaire, Labrum, Solium, Baptistère, Exèdre, Sphaeristère, lavatrina,

Nom propres : Empereur Agrippa ; Charles Dézobry, Auguste, Tibère.

 

 

 

Rome au siècle d'Auguste,
ou

Voyage d'un Gaulois à Rome à l'époque du règne d'Auguste et pendant une partie du règne de Tibère.

par Charles Dézobry


LETTRE XII

LES BAINS PRIVÉS ET LES BAINS PUBLICS.


Il est un genre de luxe que je vois croître et se développer tous les jours, c'est celui des bains. Le bain est non seulement une jouissance, mais un besoin dans ce pays où il fait si chaud que le corps se trouve dans une transpiration pour ainsi dire continuelle. Aussi, riches et pauvres, grands et petits, tous se baignent, et se baignent chaque jour. Il y a environ dix ans, Agrippa, gendre et ministre de l'Empereur, faisant exécuter une foule de travaux et de monuments pour l'agrément et l'utilité du peuple, établit entre autres cent soixante-dix Bains publics, où pendant une année le peuple fut admis gratuitement. Maintenant, excepté les enfants, qui jouissent encore de leurs entrées franches, tout le monde paye à la porte la rétribution d'un quadrans, petite monnaie d'airain. Pour cette minime somme, on peut prendre bain froid, bain tiède, bain chaud, et bain de vapeur. C'est ce que font la plupart des baigneurs, car, d'après les habitudes générales, se plonger dans l'eau froide ou dans l'eau chaude, ce n'est pas se baigner.
Autrefois les bains n'étaient que de simples piscines où l'on venait nager, s’exercer, se laver surtout, comme le prouve leur ancien nom de lavatrina. Vers la fin du dernier siècle, du temps de Pompée, il y avait fort peu d'établissements de ce genre, particuliers ou publics, bâtis avec soin et pourvus des recherches qu'on y trouve communément aujourd'hui. La description suivante te donnera une idée des Bains actuels ; bien que ce soit celle des Bains de Mamurra ; auxquels je voulais consacrer une lettre spéciale, cependant elle convient, sauf quelques détails d'ornementation, à tous les Bains en général : les mêmes besoins ont commandé partout les mêmes dispositions.
Les Bains de mon hôte sont auprès de la Basilique, de l'Exèdre, et du Sphaeristère ; ils ne s'en trouvent séparés que par une petite cour pavée en mosaïque, entourée d'un péristyle en colonnes octogones, et à l'entrée de laquelle est un Baptistère, grand bassin où l'on prend quelquefois le bain froid en commun. Un toit léger, supporté par deux colonnes en avant-corps, couvre le Baptistère. Des peintures représentant des arbres chargés de fruits, des rivières où toutes sortes de poissons semblent nager dans la profondeur des eaux, ornent les parois des portiques.
La première pièce où l'on entre en quittant la cour est une salle nommée Apodytère, nom formé d'un mot grec qui signifie dépouiller, parce que c'est là que l'on dépouille ses vêtements, et que l'on chausse des mules légères, composées d'une semelle plate couverte seulement sur l'avant-pied.
De l'Apodytère on passe dans le Frigidaire, autre salle où l'on trouve encore un Baptistère pour le bain froid, quand on ne veut point le prendre en plein air. L'une des extrémités du Frigidaire se termine par un hémicycle au centre duquel gît la cuve du bain, Labrum ou Solium, entourée d'un petit espace clos par un Pluteus ou mur d'appui. Des pilastres, des niches, des statues décorent le pourtour de l'hémicycle, dont le soubassement, formé par un double rang de gradins, s'appelle Schola, l'école, parce que c'est là que ceux qui assistent aux Bains sans y prendre part, ou qui attendent qu'il y ait place dans la cuve, viennent s'asseoir pour converser. Entre l'École et la cuve, il reste un chemin, Alveus, pour circuler autour des baigneurs. Le Frigidaire reçoit son jour par en haut, de sorte que les corps n'y projettent point d'ombre.

Le bain tiède, Tepidaire, suit immédiatement le Frigidaire. A peu près carré, et terminé aussi par une École, il est muni de deux grands bassins si larges, que l'on pourrait presque y nager. Comme on n'entre guère dans le Tepidaire que pour s'y baigner, son École sert essentiellement aux baigneurs, soit pour s'essuyer lorsqu'ils se contentent du bain tiède, soit pour se reposer en sortant de la pièce suivante où l'on prend le bain de vapeur, et que pour cette raison l'on nomme Sudatoire, ou Caldaire.
Le Sudatoire est circulaire, entouré de trois gradins, et garni tout à l'entour de niches étroites, contenant chacune un siège.
Un réservoir d'eau bouillante occupe le milieu de la salle. Il fournit des tourbillons d'une vapeur qui se répand partout, monte en nuages épais vers la voûte, de forme hémisphérique, recouverte d'un enduit épais de stuc fin et s'y engouffre avec violence. Elle s'échappe au sommet par une ouverture étroite, fermée avec un bouclier rond, en airain, qui se manoeuvre d'en bas, à l'aide d'une chaîne ; on l'ouvre comme une soupape quand la chaleur devient trop suffocante.
Je n'oublierai de ma vie la première fois que je suis entré dans un Sudatoire : saisi par les flots de la vapeur, haletant, palpitant, poussant de gros sanglots, je crus que j'allais étouffer. L'air mêlé de feu et d'humidité que l'on respire en ce lieu ne laisse pas un seul endroit du corps en repos ; il le secoue, il le remue jusque dans ses moindres parties ; on se croirait presque dans le foyer d'un incendie ; la température de ce bain est si brûlante, que l'on pourrait condamner à être baigné vif un misérable convaincu de quelque crime.
Le Sudatoire et sa cuve sont chauffés par un fourneau extérieur nommé Laconinum, ou Hypocaustum. Ses flammes circulent sous le pavé, qui est porté sur une multitude de petits piliers, et, au moyen de canaux conducteurs, jusque dans l'épaisseur des murs.
Un Eleothése ou Unctoire, lieu dans lequel se déposent les parfums, complète, avec quelques autres petits cabinets, et avec le Sphaeristère, dont j'ai parlé dans ma lettre précédente, l'ensemble des Bains de Mamurra.
Il faudrait être bien difficile pour ne pas trouver ces Bains, si élégants et si riches, dignes de la somptueuse demeure de mon hôte ; cependant ils sont surpassés de beaucoup par ceux de Mécène, et surtout d'Agrippa : le premier possède un Bain avec des bassins d'eau chaude si vastes qu'on peut y nager ; et le second, qui en fait de constructions et de travaux d'art n'a que de grandes idées, s'est construit les Bains les plus spacieux, les plus beaux, les plus somptueux qu'on ait jamais vus à Rome. Agrippa loge au Palatin ; mais il n'y avait pas sur cette montagne un espace suffisant pour lui ; il s'est donc transporté au milieu du Champ de Mars, qu'il avait déjà embelli par le Panthéon, et là, derrière et joignant ce temple, il a construit son édifice, qui occupe une superficie de terrain presque égale à la moitié de celle de la montagne Palatine ; il est élevé sur un carré de six cent cinquante pieds en tous sens où les Bains proprement dits sont un édifice de sept cent dix pieds de face, sur trois cent quarante de côté.
Construit à l'imitation des Palestres grecques, on y trouve, outre les salles destinées aux diverses lotions, des galeries pour les exercices de la paume, de la lutte, et des autres jeux gymniques. La plupart sont autour de deux grandes cours quadrangulaires, de cent soixante-seize pieds sur cent vingt-sept, et entourées de portiques pour la promenade. Les murs des salles sont revêtus de stuc ou peints à l'encaustiques, et le Sudatoire, ajouté aux bains dix ans après leur construction, est orné de tableaux encadrés de marbre.
L'agrément de cet édifice vraiment royal se trouve encore augmenté par un jardin qu'Agrippa a créé tout exprès. Il y avait là un marais, le fameux Marais de la Chèvre, près duquel Romulus disparut pour devenir immortel ; Agrippa convertit le marais en étang alimenté par des eaux vives, planta autour des jardins délicieux, et s'y bâtit une habitation de plaisance où il peut se reposer après le bain, souper, et passer la nuit au milieu des frais ombrages, jusqu'à ce que le retour du jour le rappelle à Rome, et ramène pour lui le tracas et les soucis des affaires. Ceux qui ne sont pas assez riches pour avoir des Bains à eux (et le nombre en est grand) vont aux Bains publics. Personne ne dédaigne ces établissements ; à côté du pauvre plébéien, on y voit d'illustres citoyens et des riches de second ordre : seulement ces derniers s'y rendent accompagnés de leurs clients. L'heure générale est depuis midi jusqu'au soir.
Aller aux Bains est plus qu'un besoin, c'est une mode; des milliers de personnes y vont par désoeuvrement, par curiosité, pour y rencontrer leurs connaissances ou leurs amis. Là, certains riches quêtent des convives pour souper, et une foule de pauvres hères, un souper pour leur ventre affamés.
Les femmes fréquentent les Bains dans un but moins innocent : elles en font des lieux d'intrigues ; aussi aiment-elles ces établissements avec passion. C'est pour elles comme un terrain de liberté, où la tromperie est d'autant plus facile qu'elle se passe dans la foule, et se cache sous les apparences d'une démarche commandée au moins par l'usage, sinon par la santé.
Un citoyen qui n'appartient pas à la plèbe se fait suivre au bain par un ou plusieurs esclaves qui portent son linge dans une petite corbeille, gardent ses habits, le retirent de l'eau, le soutiennent quand il marche, l'aident à s'avancer dans la foule en un mot lui rendent tous les services dont il peut avoir besoin. Celui qui n'a point d'esclaves trouve là des gens pour lui en tenir lieu ; ces serviteurs bénévoles n'appartiennent point à l'établissement dont tout le personnel se compose d'un baigneur, gardien du bain, d'un chauffeur ou fournier, et de quelques autres esclaves condamnés, comme criminels, aux travaux publics ; mais ils n'en sont que plus empressés : stimulés par leur intérêt privé, ils circulent dans toutes les salles, et se montrent toujours prêts à courir au moindre signe des baigneurs. On les rencontre d'abord dans l'Apodytère. Il y a là, tout autour des murs, de petites niches carrées de deux pieds sur deux pieds et demi environ, où les baigneurs qui se fient à la foi publique placent leurs habits. Les niches sont à six ou sept pieds du pavé, de sorte qu'on n'y peut guère atteindre qu'avec une escabelle. Ce léger obstacle n'arrêtant point certains indévots, des individus se sont ingéniés de se faire les auxiliaires de la foi publique, en offrant aux baigneurs de garder leurs habits moyennant une petite rétribution de deux as où deux as et demi. Ils les mettent dans une cassette Capsa, ce qui les a fait appeler Capsaires. Il est toujours prudent d'accepter leurs services quand on n'a pas de serviteur à soi.
A l'intérieur, vous rencontrerez les aliptes ou oigneurs faisant les fonctions de parfumeurs et de frictionneurs. Ils sont faciles à reconnaître, parce qu'ils portent le petit bagage de leur métier : de la main droite une éponge, de la gauche, et enfilés dans un gros anneau, une ampoule à anses, de terre ou de corne, pleine de parfums, et quelques Strigiles pour les frictions. Les strigiles sont des espèces de grattoirs d'airain , ou de fer, longs de neuf à quinze onces, les uns courbés comme une petite faux ; les autres droits, et tous creusés en cuiller dans la partie opposée à la poignée, de manière à s'appliquer aisément sur les rotondités des bras, des épaules, des cuisses ou des jambes. Après eux viennent les Alipiles, épileurs et les masseur : le bain étant toujours accompagné de frictions nombreuses et multipliées ; que les Romains recherchent avec délices.
Au sortir de la Cuve ou du Sudatoire, le baigneur s'étend sur une espèce de lit de repos, et un jeune masseur (ce sont des enfants ou des ennuques qui remplissent ces fonctions, surtout pour les citoyens qui ont des esclaves), un masseur, dis-je, commence par lui presser tout le corps pour lui masser, lui pétrir, pour ainsi dire, la chair, pour lui assouplir les articulations. Ensuite il passe aux frictions : la main armée du Strigile, il frotte vivement, ou plutôt racle la peau, pour enlever la partie de l'épiderme qui se renouvelle, et forme, en se mêlant à la poussière, une impureté nuisible à la transpiration. Ces frictions durent assez longtemps, et pour qu'elles ne deviennent pas douloureuses, il faut que le frictionneur soit doué d'une certaine habileté. Cette opération est suivie de la dépilation des aisselles, que l'Alipile ou le Parfumeur pratique soit au moyen de petites pinces soit à l'aide d'un onguent composé de graine de saule noir amerain, avec égal poids de litharge L'onction suit les frictions : le patient est légèrement oint d'abord avec un liniment de saindoux et d'ellébore blanc, qui a la vertu de faire disparaître les démangeaisons et les échauboulures puis avec des huiles et des essences parfumées Ensuite on l'essuie avec des étoffes de lin, ou d'une laine fine et douce, et tout est fini. Alors il s'enveloppe dans une gausape d'écarlate, espèce de grande toge velue en dedans ; ses esclaves viennent l'enlever, le mettent dans une litière fermée, et le rapportent chez lui : voilà pour les riches, ou les demi-riches.
Les pauvres se contentent d'une simple friction avec la main, ou bien d'une autre, plus économique encore, qu'ils s'administrent eux-mêmes, en s'aidant des murailles contre lesquelles ils se frottent les parties du corps que leurs mains ne sauraient atteindre facilement ; cela suffit à ces petits plébéiens, qui ne sont pas, en général, d'une propreté fort recherchée, et dont la plupart ont pour habitude de se moucher sur le bras.
On se prépare aux frictions par des jeux et des amusements violents, qui provoquent une sueur abondante : les uns s'exercent à la lutte, ou balancent leurs bras chargés de masses de plomb ; les autres jouent à la paume ; d'autres, les mains liées, montrent leur adresse à ramasser des anneaux, ou bien, mettant un genou en terre, se renversent en arrière, jusqu'à ce qu'ils touchent avec leur tête l'extrémité de leurs pieds.
Les sexes sont séparés dans les bains publics, mais tout le monde est entièrement nu. Ici, où le vêtement forme comme une partie de la condition, cette nudité établit une sorte d'égalité dont personne ne se fait faute ; aussi rien de plus bruyant qu'un Bain : figure-toi toute espèce de cris, de clameurs ou de bruits qui peuvent importuner, fatiguer, déchirer les oreilles. Là, ce sont les gémissements naturels ou imités de ceux qui se livrent aux exercices violents ; leurs sifflements et leurs soupirs profonds quand ils laissent échapper leur haleine longtemps retenue ; les exclamations des joueurs de paume comptant leurs balles ; plus loin, des baigneurs qui s'amusent à courir autour de la cuve, en se tenant par les mains, et se les chatouillant de manière à provoquer les éclats de rire les plus perçants ; d'autres qui lisent à haute voix, ou déclament des vers ; d'autres, chanteurs impitoyables, ne trouvant leur voix belle que dans le bain, qui se mettent à chanter jusqu'à faire trembler les voûtes de l'édifice. Des Alipiles, pour se faire mieux remarquer, venant aussi se joindre à ce discordant concert, crient d'une voix grêle et glapissante, et ne se taisent pas qu'ils n'aient trouvé des aisselles à épiler, des patients à faire crier à leur place. Ajoute à ce vacarme, qui serait insupportable, n'eût-il que l'inconvénient d'être renfermé, le bruit des frictions plébéiennes, que l'on entend résonner, suivant que la main du frictionneur frappe du creux ou du plat ; les baigneurs qui se jettent dans l'eau avec fracas ; les filous, pris à voler les habits les ivrognes, les marchands de comestibles et de boissons, car beaucoup de personnes boivent et prennent quelques aliments légers en sortant de l'eau ; les marchands de gâteaux, les vendeurs de boudin, les confiseurs, qui tous ont leur modulation particulière pour crier leur marchandise ; figure-toi tout cela, dis-je, et tu auras une faible idée de l'intérieur d'un Bain public. La seule loi de décence qu'on y observe, c'est que jamais un père et un fils ne se baignent l'un devant l'autre ni même un beau-père devant son gendre.

ACHÈVEMENT. Depuis quelques années, se baigner n'est plus seulement un besoin, mais une passion. Les luxurieux prennent le bain plusieurs fois par jour. Les Bains publics, ou plutôt les Thermes, nom que l'on commence à leur donner, sont devenus d'immenses monuments, où l'on a réuni tous les genres de jouissances, en y plaçant jusqu'à des bibliothèques. Un luxe effréné gagne aussi les Bains privés, qui conservent toujours le nom de Balnea ou Balinea. Avec la propension des Romains à tout porter à l'extrême, je ne sais où cela s'arrêtera. La lettre suivante de quelqu'un qui vient acquérir une maison auprès de Literne, en Campanie, petite ville où Scipion, le premier Africain, finit ses jours dans l'exil, te fera connaître l'état des Bains, tant privés que publics, longtemps après le principat d'Auguste.
« C'est de la villa même de Scipion l'Africain que je vous écris cette lettre, après avoir rendu hommage aux mânes de ce grand homme, sur un autel que je soupçonne être son tombeau. L'âme de ce héros était descendue du ciel, et elle y est remontée, je n'en doute point ; non parce qu'il a commandé de grandes armées, avantage dont a joui comme lui ce furieux Cambyse dont la frénésie eut de si heureux succès, mais à cause de sa rare modération et de sa piété, bien plus admirable quand il quitta sa patrie que quand il la défendit. Il fallait que Rome perdît Scipion ou sa liberté. « Je ne veux, dit-il, déroger à nos lois ni à nos institutions ; la justice doit être égale pour tous les citoyens. Jouis sans moi, ô ma patrie, d'un bien que tu me dois : j'ai été l'instrument de ta liberté, j'en deviendrai la preuve. Je pars, si je suis plus grand que ton intérêt ne le demande. » - Il se retira à Literne, rendant son exil volontaire aussi honteux pour Rome que glorieux pour lui-même.
« J'ai vu sa villa, bâtie en pierre de taille, environnée d'un mur - qu'entoure une forêt, et flanquée de tours lui servant de fortifications. Au bas de la maison et des jardins se trouve une citerne qui suffirait pour l'usage d'une armée entière. Le Bain, fort petit, est obscur, selon la coutume de nos ancêtres : ils ne trouvaient un Bain chaud que quand on n'y voyait pas clair. Ce fut un grand plaisir pour moi de comparer les moeurs de Scipion avec les nôtres. Dans ce réduit, ce héros, la terreur de Carthage, à qui Rome doit de n'avoir été prise qu'une seule fois, baignait son corps fatigué des travaux de l'agriculture ; car il s'exerçait à ce genre de travail, et, selon la coutume des vieux Romains, cultivait son champ lui-même. Voilà donc la chétive demeure qu'il habitait ! le vil pavé que foulaient ses pas vénérables ! Qui voudrait aujourd'hui se baigner à si peu de frais ? On se regarde comme pauvre et misérable, si les pierres les plus précieuses, arrondies sous le ciseau, ne resplendissent de tous côtés sur les murs ; si les marbres d'Alexandrie ne portent des incrustations de marbre de Numidie ; si à l'entour ne règne pas une bordure de pierres dont les couleurs variées imitent à grands frais la peinture ; si les plafonds ne sont lambrissés de verre ; si la pierre de Thast, magnificence que montraient à peine autrefois quelques temples, ne garnit les piscines où nous étendons nos corps épuisés par une excessive transpiration ; si l'eau ne coule de robinets d'argent. Et je ne parle encore là que de Bains destinés à la plèbe : que sera-ce si je viens à décrire ceux des affranchis ? Combien de statues, combien de colonnes qui ne soutiennent rien, mais prodiguées par le luxe pour un vain ornement ! Quelles masses d'eau tombant en cascades avec fracas ! Nous sommes parvenus à un tel point de délicatesse, que nos pieds ne veulent plus fouler que des pierres précieuses. Dans le Bain de Scipion, on trouve des rayères plutôt que des fenêtres, pratiquées dans un mur de pierre pour introduire la lumière sans nuire à sa solidité. Maintenant, on appelle les Bains des cachots, s'ils ne sont pas disposés de manière à recevoir le soleil pendant toute la journée, par d'immenses fenêtres ; si l'on ne s'y hâle en même temps qu'on se baigne ; si de la cuve on n'aperçoit les campagnes et la mer ; si la cuve n'est en argent. Aussi les Bains, qui lors de leur dédicace avaient attiré la foule et excité l'admiration, sont méprisés comme des antiquailles depuis que le luxe est venu à bout de s'écraser lui-même sous les nouveaux ornements qu'il a fait inventer.
« Une des plus bizarres recherches des baigneurs voluptueux sont les bains suspendus. On les prend dans des baignoires en métal, munies de quatre gros anneaux où s'attachent, des chaînes tombant de la voûte du bain. Dès que le baigneur est dans l'eau, on l'enlève avec sa baignoire, souvent très grande, et pendue comme un lustre ; un appareil de machines mués par des esclaves le balance plus ou moins vite, plus ou moins haut, plus ou moins fort, suivant son commandement, tant que dure son bains. Cette invention date du milieu du siècle dernier. Les Romains la trouvèrent si belle, qu'ils citent le nom de l'inventeur : c'est un certain Sergius Orata, qui s'ingénia de disposer des bains suspendus dans des villas, qu'il revendait ensuite avec avantage, tant son invention obtint de succès !
« On ne comptait autrefois qu'un petit nombre de Bains, et ils étaient sans aucune décoration. A quoi bon décorer des lieux où tout le monde pouvait entrer pour un quadrant, des lieux destinés non pas à l'agrément, mais au besoin ? On n'y voyait point, comme aujourd'hui, l'eau couler avec abondance et se renouveler perpétuellement, comme le jet d'une source chaude ; on ne regardait pas comme un point essentiel la transparence de l'eau dans laquelle on déposait sa malpropreté. Mais, bons dieux, quel plaisir d'entrer dans ces Bains obscurs et dont les murs était grossièrement enduits, quand on savait qu'un édile comme Caton, comme Fabius Maximus, ou l'un des Cornélius en avait lui-même réglé la température ! Ces nobles édiles s'acquittaient de ce devoir; ils visitaient ces lieux fréquentés par le peuple, veillaient à leur propreté, et à ce qu'on y entretînt une chaleur utile et salubre, différente de celle que l'on a depuis peu imaginée, qui ressemble à un incendie. Combien ne trouve-t-on pas Scipion grossier de n'avoir point ouvert son caldarium à tous les rayons de la lumière, de ne s'être pas cuit au grand jour, de ne s'être pas proposé de digérer dans le bain. Oh ! l'infortuné! qu'il savait peu vivre ! L'eau dans laquelle il se baignait, loin d'être reposée, était souvent trouble, et même presque bourbeuse pendant les grandes pluies. Mais il ne s'en embarrassait guère : il venait y laver sa sueur et non ses parfums. « Je n'envie pas le sort de Scipion, dirait-on aujourd'hui; c'est être vraiment en exil que de se baigner de cette manière. » Mais je vous dirai plus encore : il ne se baignait pas quotidienne-ment, car, au rapport des écrivains qui nous ont transmis les anciens usages de la ville, on ne se lavait tous les jours que les bras et les jambes, auxquels les travaux avaient pu faire contracter quelque souillure ; l'ablution du corps entier n'avait lieu que tous les neuf jours, à l'époque des marchés, ainsi que cela se pratique encore pour les esclaves de nos villas.
«On était donc bien sale ! » me répondra-t-on. - Depuis l'invention des bains de propreté, on est devenu plus dégoûtant. Que dit le poète Horace pour peindre un homme décrié et, noté par l'excès de son luxe ? « Qu'il sent les parfums. » Du temps de Scipion, les Romains sentaient la guerre, le travail, le héros : lequel préférez-vous? »

 

 

 

 

Commentaire des lecteurs Chaque personne ayant procédé à la lecture de ce livre pourra, si elle le souhaite, y faire paraître un commentaire ou un résumé en lien avec le massage.

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