|     ANNALES 
                        D'HYGIENEPUBLIC
 ET
 DE MEDECINE LEGALE
 
 CONGRES POUR LA REPRESSION DE L'EXERCICE ILLEGAL 
                        DE LA MEDECINE Tenu à Paris 
                        le 28 et 31 mai 1906   Discours prononcé 
                        par le professeur Brouardel à la séance 
                        d'ouverture, le 28 mai 1906 Messieurs, Ma 
                        première parole sera pour remercier MM. les membre 
                        de la magistrature et du barreau, qui, pendant la période 
                        de préparation du Congrès, nous ont donné 
                        leur concours, soi en rédigeant des rapports 
                        personnel, soi en nous aidant à résumer, 
                        dans des formules juridiques, les conclusions des diverses 
                        questions soumises au Congrès. Cette 
                        collaboration nous a profondément touchés, 
                        non pas seulement pace qu'elle nous a été 
                        fort utile, mais surtout pace qu'elle nous a prouvé 
                        que, contrairement à la légende fort ancienne, 
                        nous avons parmi les juristes et les conseillers des 
                        amis très sincères. Je 
                        remercie également les représentants des 
                        ministères de la Justice, de l'Instruction publique, 
                        de l'Intérieur, de la   (page 
                        6) Préfecture 
                        de Police, qui nous a fait l'honneur d'assister à 
                        nos travaux. Plusieurs de nos confrères d'au 
                        delà du Rhin, de Belgique, de la presse française 
                        et étrangère témoignent, par leur 
                        présence, de l'intérêt qu'il attachent 
                        à la solution des questions soumises aux délibérations 
                        du Congrès. A vous, messieurs, j'adresse mes 
                        remerciements et une cordiale bienvenue. Je 
                        veux exposer, aussi brièvement possible, le but 
                        que le Congrès s'est proposé d'atteindre. 
                        Grace au zèle du Comité d'initiative, 
                        de son président, M. Dr Duchesne, 
                        que, malheureusement, sa santé retient loin de 
                        nous, grace surtout à notre dévoué 
                        secrétaire général, dont la vaillance 
                        et la bonne santé ont résisté à 
                        toutes les fatigues, nous avons réuni un ensemble 
                        de rapports, dont la lecture met le but en pleine lumière. Messieurs, 
                        dans tous les pays, lorsqu'un peuple est arrivée 
                        à un certain degré de civilisation, les 
                        pouvoirs publics ont pensé que la vie et la santé 
                        étaient des bien trop précieux pour que 
                        des personnes incompétentes aient la direction 
                        du traitement et des soins à donner aux malade 
                        ou aux blessés. Les 
                        législateurs ont donc édicté des 
                        lois, variables suivant les moeurs et les habitudes 
                        des diverses nations ; mais toutes ont été 
                        inspirées par une même pensée : 
                        protéger la vie et la santé de leur concitoyens. Comme 
                        conséquence, ils ont exigé que les personnes 
                        à qui ils confiaient le droit de donner des soins 
                        au malades possèdent une compétence réelle, 
                        démontrée par de longues études, 
                        de nombreux examens et des sacrifices pécuniaires 
                        élevés. L'intérêt 
                        capital est pour nous tous, médecins et non-médecins, 
                        celui de la santé des malades. Mais le médecin 
                        a parfois le droit de se demander si les sacrifices 
                        que les pouvoirs publics lui ont imposés sont 
                        suffisamment appréciés par les magistrats 
                        chargés de veiller simultanément sur la 
                        protection des malades et des médecins,   (page 
                        7)associés, reliés dans une solidarité 
                        absolue, par la volonté formelle du législateur.
 Parlant 
                        de l'exercice 
                        illégal de la médecine, un 
                        de nos anciens a dit : " Les médecins en 
                        souffrent, les malades en meurent.". Ils 
                        ne meurent pas tous ; en ce cas, la vérité 
                        serait si éclatante que la question serait résolue. 
                        Mais beaucoup restent estropiés. Le Dr 
                        Thiéry, chirurgien des hôpitaux, a communiqué 
                        au docteur Dr Saint-Aurens une série 
                        d'observations de panaris soignés ou incisés 
                        par des marchands de vins ou des pharmaciens, qui ont 
                        presque tous abouti à la perte des phalanges. D'autres 
                        guérissent malgré les traitement les plus 
                        irrationnels. C'est qu'en effet tous les malades ne 
                        sont pas atteints d'une affection mortelle, et, lorsque 
                        le charlatan se présente devant les tribunaux, 
                        il est entouré par une cohorte de clients, animés 
                        par la foi ; pour eux il est un sauveur, un demi-dieu. Quant 
                        aux victimes, elles sont sous la terre, et personne 
                        ne prend la parole en leur nom. Pour 
                        moi, j'estime que les faits directs causés par 
                        l'intervention et les conseilles des personnes incompétentes 
                        ne sont pas les plus nombreux et peut-être les 
                        plus graves. Ces avis incohérents ne permettent 
                        pas au malade de recevoir, en temps utile, les soins 
                        qui auraient pu le guérir. Parmi 
                        de nombreux exemples, j'en prends un : la phtisie pulmonaire. 
                        A la find e février, cette année, je suis 
                        allé dans deux salles d'hommes d'un hôpital 
                        de Paris et j'ai posé au phtisiques la même 
                        question : A quel moment avez-vous été 
                        ausculté pour la première fois ? Ma santé 
                        ne m'a pas permis de continuer l'enquête, celle-ci 
                        ne porte que sur les 63 malades, chiffre insuffisant, 
                        cela est certain. Je crois pourtant qu'il est suggestif. Sur 
                        ces 63 phtisiques, 9 avaient été auscultés 
                        par des médecins au cours de leur maladie, sans 
                        qu'il m'ait été possible de préciser 
                        à quelle période de celle-ci ; cet examen   (page 
                        8)avait été pratiqué. 
                        2 d'entre eux l'avaient été à travers 
                        leurs vêtements de drap, sans qu'on eût 
                        pris la peine de les dévêtir.
 15 
                        avaient été auscultés pour la première 
                        fois, quand, terrassés par la maladie, ils avaient 
                        dû faire appel aux soins du médecins du 
                        Bureau de bienfaisance. Les 
                        39 autres n'avaient pas été auscultés 
                        avant de se présenter à la consultation 
                        de l'hôpital. Je 
                        répète que ces chiffres donnent une indication 
                        qu'il sera facile de compléter et de rectifier 
                        par une véritable statistique. Cette constatation 
                        prouve que, pendant des mois et des années, personne 
                        ne s'était occupée de faire le diagnostic 
                        de la maladie de ces malheureux. On leur avait délivré 
                        des remèdes contre la toux, mais on avait institué 
                        aucune médication curative. On ne leur avait 
                        donné aucun conseil pour empêcher la contamination 
                        de leurs femmes, de leurs enfants, de leurs camarades 
                        d'atelier. Je 
                        suis convaincu que de telles pratiques font encore plus 
                        de victimes, par l'omission de tout traitement utile 
                        que les méfaits directes, résultant des 
                        interventions malheureuses des charlatans. Je pense 
                        qu'il y a lieu d'insister sur ce danger, parce que si, 
                        par hazard, les coupables sont poursuivit, les tribunaux 
                        ne trouvent pas que la distribution de ces potions anodines 
                        constituent le délit d'exercice illégal 
                        de la médecine. Il n'en est pas moins certain 
                        que ces habitudes vouent chaque année à 
                        la mort de milliers de victimes. Mais 
                        chers Confrères, vous vous plaignez, dans les 
                        rapports que vous avez déposé, des insuffisances 
                        de la loi de 1892, vous avez raison. Il y a lieu toutefois 
                        de faire deux remarques. La première est celle-ci 
                        : tout ce qui concerne les droits et les devoirs des 
                        pharmaciens a été renvoyé, par 
                        le Parlement, à la loi sur l'exercice de la pharmacien. 
                        En 1892, celle-ci semblait devoir venir prochainement 
                        en délibération. Aujourd'hui, elle apparaît 
                        réservée pour   (page 
                        9)le contingent des loi destinées 
                        à un très lointain futur.
 La 
                        seconde remarque est un peu plus délicate à 
                        vous présenter. La loi de 1892 est incomplète 
                        ; mais permettez-moi de vous dire que c'est un peu de 
                        votre faute. Les rapporteurs de la Chambre, au Sénat, 
                        les commissaires du Gouvernement ont sollicité 
                        leurs confrères de leur adresser des propositions 
                        pouvant entrer dans un texte de loi ; nous avons reçu 
                        nombre de lettres de lamentations dénonçant 
                        des faits déplorables sans doute, mais aucune 
                        proposition visant les mesures à prendre pour 
                        les faire cesser. Nous 
                        avons obtenu que, dans la loi, on insérât 
                        les deux conclusions votées par le Congrès 
                        de 1845 : la suppression des officiers de santé 
                        et la modification demandée à l'article 
                        2101 du Code civil, réglant les honoraires du 
                        médecin après la dernière maladie. Grace à l'énergique 
                        intervention de M. Émile Loubet, alors président 
                        du Conseil des Ministres, nous avons obtenu que les 
                        syndicats médicaux possèdent une existant. 
                        Cette autorisation avaient été refusée 
                        lors de la première et de la deuxième 
                        délibération du Sénat. Nous 
                        avons fait rentrer, dans la loi, l'exercice de l'art 
                        dentaire. Nous 
                        avons établi une définition plus précise 
                        du délit d'exercice illégal de la médecine. Mais 
                        pas une seule proposition précise ne nous a été 
                        transmise par le corps médical. Au moment où 
                        a surgi la pensée de réunir ce Congrès, 
                        nous avons fait appel à nos confrères, 
                        en les priant de formuler leurs desiderata, aux membres 
                        de la magistrature et du barreau, pour donner à 
                        nos conclusion une forme juridique. Les résultats 
                        auxquels nous sommes arrivés dans les travaux 
                        préparatoires nous permettent de croire que, 
                        lorsque sonnera l'heure de la révision de la 
                        loi de 1892, vos futurs représentants serons 
                        mieux armés que leurs prédécesseurs. Messieurs, 
                        si nous réussissons dans cet effort, qui certainement, 
                        devra être suivi de plusieurs autres, le corps   (page 
                        10)médicale en bénéficiera 
                        ; mais surtout, et c'est pourquoi nous faisons appel 
                        au concourt de tous ceux qu'intéresse la santé 
                        du peuple, les malades recevront les soins éclairés 
                        que la législature a voulu leur assurer en édictant 
                        la loi sur l'exercice de la médecine.
 Messieurs, 
                        je déclare ouvert le Congrès de 1906, 
                        réuni pour la répression de l'exercice 
                        illégal de la médecine.     Le 
                        secrétaire générale, le Dr Levassort, 
                        donna ensuite lecture de son rapport, dans lequel il 
                        exposa la genèse du Congrès et son utilité 
                        non seulement pour les médecins, mais surtout 
                        pour les malades. Après avoir montré avec 
                        quel élan les médecins et les groupements 
                        professionnels ont répondu à l'appel du 
                        Comité d'initiative, M. Levassort souhaita la 
                        bienvenue aux deux cents congressites présents, 
                        ainsi qu'aux délégués des associations 
                        médicales des pays étrangers qui assistaient 
                        à la séance d'ouverture. Le 
                        bureau provisoire ayant été maintenu à 
                        titre définitif dans ses fonctions, le Congrès 
                        commença immédiatement ses travaux.     Exercice 
                        illégal par des rebouteurs, sorciers, toucheurs, 
                        etc. _ Les rebouteurs sont, d'après 
                        Littré, 
                        "ceux qui, sans autre instruction de l'empirisme, 
                        remettent les luxations, les entorses, les fractures". 
                        A ces lésions, on doit ajouter les luxations 
                        tendineuses, les synovites, les ruptures musculaires, 
                        toutes affections ressortissant de la pathologie externe. 
                        Le rebouteur peut être adroit, ce qui est loin 
                        d'être la règle ; dans ce cas, s'il ait 
                        à soigner une affection de peu de gravité 
                        chez un sujet bien portant, une fracture simple, par 
                        exemple, elle se consolidera sans trop de difformité 
                        et assez rapidement ; la réduction a été 
                        facile ; les massages pratiqués par une 
                        mains exercée ont aider la nature, et la guérison 
                        est survenu dans de bonne condition. Il en sera de même 
                        dans certaines luxations et dans bon nombre d'entorses.   (page 
                        11)Mais, le plus souvent, le rebouteur est 
                        brutal et inhabile et aggrave les lésions qu'il 
                        comptait réparer ; il transformera en fracture 
                        complète une fracture incomplète ; par 
                        suite d'une réduction mal faite, il laissera 
                        se produire un cal difforme ou une speudarthrose. Le 
                        membre, serré trop fortement par un bandage contentif, 
                        sera envahi par le sphacèle. Quant aux fractures 
                        juxta-articulaires, le rebouteurs les ignore et, le 
                        plus souvent, les traite comme des luxations ; de sorte 
                        que les tentatives de réduction aggravent toujours 
                        les lésions et que les guérison fonctionnelle 
                        est le plus souvent compromise.
 Le 
                        guérisseurs dit le Dr. Léon Pouliot, dans 
                        son intéressant rapport (1), est un empirique, 
                        soignant de préférence les maladies internes 
                        au moyen de médicaments empruntés à 
                        la nature. Les guérisseurs emploient de préférence 
                        des remèdes végétaux ; ils administrent 
                        des bouillons aux herbes, des simples triturés 
                        à leur manière ou macérés 
                        dans l'alcool. Les matières excrémentitielles 
                        jouent un rôle considérable dans leur thérapeutique 
                        ; l'urine est souvent employée intus et extra 
                        ; la fiente d'un grand nombre d'animaux est d'un usage 
                        courant ; les animaux immondes, vers de terre ou crapauds, 
                        sont doués, au dire de ces charlatans, de propriétés 
                        curatives indéniable. La 
                        tendance naturelle de beaucoup de maladies, même 
                        graves, vers la guérisons est la cause des succès 
                        des guérisseurs. Leurs remèdes sont, le 
                        plus souvent, inoffensifs, et quelques-uns ont même 
                        une légère action curative ; les tisanes 
                        pectorales, ou sudorifiques, les purgatifs doux, les 
                        diurétiques aident, dans une certaine mesure, 
                        le malade à guérir. Cependant, à 
                        côté de ces cas où les guérisseurs 
                        n'ont pas été nuisibles, où "ils 
                        ont laissé guérir leur malade", que 
                        de fait désastreux, dans lesquels une médication 
                        intempestive, pour une affection non diagnostiquée, 
                        a entraîné un dénoûument fatal 
                        qui aurait pu être évité !(1) 
                        L. Pouliot, L'exercice illégal par les rebouteurs, 
                        sorciers et autres empiriques de même nature
   (page 
                        12) Au-dessus 
                        du rebouteur et du guérisseur, se trouvent les 
                        sorciers et les toucheurs. Les sorciers 
                        sont bons ou mauvais, et, à côté 
                        du sorcier qui jette des sorts, il y a le bon sorcier, 
                        le sorcier guérisseur, et, dans certaines contrées, 
                        c'est vers lui que le paysan se retourne quand il a 
                        épuisé les resources de la médecine 
                        populaire et quand les autres empiriques et même 
                        les médecins n'ont pas réussi à 
                        le soulager. Le 
                        toucheur est un être prédestiné 
                        qui, par l'imposition des mains et la récitation 
                        de certaines formules, guérit, comme par enchantement, 
                        les maladies les plus diverses, mais de préférence 
                        les maladies externes, telles que les ulcers variqueux, 
                        les dartres, les verrues, les anthrax, etc. Le plus 
                        employé des attouchements est le signe de la 
                        croix accompagnée d'une prière incohérente. 
                        Voici le moyen de guérir les dartres. Le toucheur récite 
                        : " 
                        les dartres vives et venimeuses, y en aurait-il dix-huit 
                        espèces, je vous touche toutes à la fois. 
                        Au nom du Père,... Notre Père,... Je crois 
                        en Dieu (trois fois)."empirique   Pour 
                        les brûlures : " 
                        le bon Dieu et saint-Jean passaient par une ville ; 
                        ils trouvèrent un homme (ou une fille, ou un 
                        garçon, suivant le cas) qui était brûlé 
                        ; et le bon Dieu dit à saint-Jean : " Buffe 
                        (c'est-à-dire souffle) "cet homme trois 
                        fois l'haleine de ton vent (à ce moment le toucheur 
                        souffle trois fois sur la brûlure). Tu feras au 
                        nom du Père et du Fils (le toucheur se signe), 
                        et cet homme sera guéri !" Les 
                        toucheurs ne font aucun diagnostic, ne donnent pas de 
                        médication ; ils n'agissent que par leur pouvoir 
                        surnaturel. On a signalé des guérisons 
                        qui, habillement exploitées, augmente la réputation 
                        de ces empiriques. La 
                        crédulité populaire est telle que les 
                        grossières roueries des sorciers leur permettent 
                        de s'attribuer tout l'honneur des cures merveilleuses, 
                        tout en déclinant la responsabilité des 
                        insuccès. Si tel malade n'a pas guéri, 
                        c'est qu'on a négligé une des prescription 
                        importante du sorcier ; si tel autre a empiré, 
                        c'est qu'il n'avait pas confiance. Les 
                        guérisons sont encore assez fréquentes. 
                        Sans parler des   (page 
                        13)malades qui eussent guéri spontanément, 
                        il ne faut pas oublier que les grands nerveux sont beaucoup 
                        plus nombreux dans la population rurale qu'on ne le 
                        croit généralement. Les mômeries, 
                        les formules magiques et la mise en scène des 
                        toucheurs 
                        et des sorciers peuvent radicalement guérir les 
                        diverses manifestations de l'hystérie. Sans aller 
                        jusqu'à la guérison complètes, 
                        il peut y avoir une amélioration plus ou moins 
                        considérable des symptômes, même, 
                        dans les maladies organiques, dont les réactions 
                        fonctionnelles peuvent être, comme on le sait, 
                        considérablement amoindries par la thérapeutique 
                        psychique.
   Si 
                        les sorciers et les toucheurs périssent quelquefois, 
                        ils occasionnent rarement une aggravation de maladie 
                        ; leurs incantations ou leurs attouchements sont sans 
                        conséquence, au contraire des manoeuvres tentées 
                        par les rebouteurs. Ce que l'on doit reprocher surtout 
                        à ces empiriques, c'est le préjudice morale 
                        qu'ils porte à la pratique médicale, et, 
                        en ce plaçant au point de vue exclusif des intérêts 
                        du malade, il faut bien se souvenir que, le plus souvent, 
                        il n'est pas indifférent qu'ils attendent des 
                        semaines ou des mois avant de consulter un médecin 
                        et recevoir les soins que réclame son état.   Quel 
                        remède apporter ? Le Dr Pouliot pense que le 
                        développement qu'ont pris les empiriques dans 
                        certaines régions tient à la difficulté 
                        des poursuites. En effet, le parquet n'ouvrira, pour 
                        ainsi dire jamais, de lui-même, une instruction 
                        contre un empirique, à moins qu'il ne soit saisi 
                        d'une plainte formelle. Cette plainte émane parfois 
                        d'un client un peu trop endommagé par le rebouteur, 
                        mais cela est excessivement rare, et beaucoup d'estropiés 
                        préfèrent se taire que de trainer en justice 
                        le rebourteur qui les a rendus infirmes ? C'est donc 
                        le médecin, ou plutôt le syndicat médical, 
                        qui, dans chaque région, devra constituer une 
                        sorte de dossier contre les empiriques ; il réunira 
                        les charges et les témoignages contre les plus 
                        compromis, de sorte que les poursuites ne seront engagées 
                        qu'avec un très sérieux dossier à 
                        l'appui ; elles seront surtout dirigées contre(page 14)
 les récidivistes, 
                        les individus coupables de coups et blessures ou d'escroquerie.
 Ce 
                        qui fait la force des empiriques c'est l'ignorance populaire 
                        : il serait bon de répandre dans le public les 
                        méfaits des rebouteurs et surtout de montrer 
                        que ce n'est pas le médecin, représentant 
                        de la science officielle qui en souffre le plus, mais 
                        le malade, qui ne reçoit pas les soins auquel 
                        il a droit. Le Dr. Pouliot pense qu'à ce point 
                        de vue l'instituteur pourrait rendre de grand services 
                        ; cependant, et c'est là l'avis des médecins 
                        exerçant dans les contrées où l'exercice 
                        illégal est le plus florissant, il faudrait tout 
                        d'abord faire l'éducation de l'instituteur lui-même, 
                        car souvent on a signalé le cas de maîtres 
                        d'école qui, lorsqu'un accident survenait parmi 
                        les enfants dont ils avaient la garde, conduisaient 
                        le petit blessé directement chez le rebouteur 
                        non chez le médecin. Pour remédier à 
                        cela, le Congrès a émis le vœu : que 
                        les syndicats médicaux, d'accord entre eux rédigent 
                        un travail montrant tous les dangers des manoeuvres 
                        de rebouteurs, guérisseurs, toucheurs 
                        et sorciers etc., et demandant au ministère de 
                        l'Instruction public que cet ouvrage fasse partie du 
                        programme des écoles normales d'instituteurs 
                        et des écoles primaires.   Maurice 
                        de Lyon pense que les médecins aident puissamment 
                        au recrutement des rébouteurs en dehors des familles 
                        de rebouteurs, où la pratique de l'exercice 
                        illégale se transmet de père en fils, 
                        la plus part des rebouteurs sont d'anciens infirmiers 
                        qui ont appris le peu qu'ils savent dans les services 
                        hospitaliers ; il en est même qui exhibent, encadrer 
                        dans le lieu où ils opèrent, un certificat 
                        de médecin dans lequel il est dit que M. X... 
                        est apte à soigner les malades, etc... Le médecin 
                        ne devrait jamais fournir de tels certificats qui sont 
                        extrêmement dangereux. Comme sanction à 
                        son rapport,  Pouliot émet les voeux suivants, 
                        qui sont adoptés par le Congrès : Le 
                        nombre et l'audace croissant des empiriques font aux(page 15)
 médecins un impérieux 
                        devoir de lutter contre cette forme de l'exercice illégal.
 Les 
                        médecins isolés ont peu de chance de réussir 
                        dans cette tâche ; ils risquent, en outre, de 
                        s'attirer des désagréments parfois sérieux. Les 
                        syndicats médicaux devront donc : a. 
                        Inviter leurs adhérents à porter à 
                        la connaissance du Bureau tous les faits d'exercice 
                        illégal ; b. 
                        Constituer ainsi un dossiers contre tous les empiriques 
                        de la région ; c. 
                        Rassembler des charges et des témoignages contre 
                        ceux des empiriques qui paraîtront les plus compromis 
                        ; recourir, dans ce but, à tous les moyens mis 
                        par la loi à notre disposition. Les 
                        poursuites judiciaires ne seront engagées qu'avec 
                        un très sérieux dossier à l'appui. 
                        Elles seront surtout dirigées contre les récidivistes 
                        ou les individus coupables de coups et blessures et 
                        surtout d'escroqueries.   Le 
                        Dr. Poulliot avait encore proposé le voeux que, 
                        dans les deux derniers cas, le syndicat demande, outre 
                        des dommages-intérêts, l'affichage du jugement 
                        aux frais du condamné, dans toutes les communes 
                        du canton il a exercé illégalement la 
                        médecine. Rocher 
                        a fait judicieusement remarqué que l'affichage 
                        constitue une augmentation de la pénalité, 
                        et que, pour que l'affichage puisse être réclamé, 
                        il fallait que cette disposition soit inscrite dans 
                        la loi. En conséquence, ce voeux a été 
                        renvoyé au moment où le Congrès 
                        discuterait des modifications à apporter à 
                        la loi du 30 novembre 1892.   Magnétiseurs 
                        et somnambules. _ Le Dr. Barbanneau 
                        (de Pouzauges) a particulièrement dans son rapport 
                        (1) l'exercice illégal de la médecine 
                        par les somnambules et magnétiseurs. Ces pratiques 
                        délictueuses sont visées par l'article 
                        16 de la loi de 1892. Les jugements rendus furent variables. 
                        En 1893, le zouave Jacob, qui prétendait 
                        posséder dans le regard un fluide magnétique
 (1) Barbanneau, Exercice illégal de la médecine 
                        par des charlatans, 
                        rebouteurs, somnambules et magnétiseurs.
 (page 16)
 capable de guérir tous les 
                        maux et qui pratiquait des passes magnétiques, 
                        imposition de mains, légers attouchements, etc., 
                        fut poursuivit pour exercice illégal. Cet individu 
                        avait déjà été plusieurs 
                        fois condamné pour exercice illégal, en 
                        vertu de l'article 35 de la loi du 19 ventôse1, 
                        an XI, et il prétendait que nulle disposition 
                        de la loi de 1892 qui, au moment des poursuites, n'étaient 
                        pas encore exécutoires, ne punissaient les pratiques 
                        de magnétisme. Les juges condamnèrent, 
                        et il été spécifier dans le jugement 
                        :
 "Qu'il 
                        appert 
                        des travaux préparatoires de la loi que, si le 
                        législateur n'a pas voulu réserver aux 
                        médecins les expériences de magnétisme 
                        et d'hypnotisme, c'est à la condition que les 
                        profanes resteraient dans le domaine des expériences 
                        purement scientifiques et n'entreraient pas dans celui 
                        de la médecine proprement dit, c'et-à-dire 
                        ne se serviraient pas du magnétisme et de l'hypnotisme 
                        pour exercer la profession de guérir."   Le 
                        Tribunal de Lille en 1897, suivit cette jurisprudence. 
                        Malheureusement, les tribunaux n'ont pas toujours rendu 
                        des jugement aussi conformes au texte comme à 
                        l'esprit de la loi. A l'occasion de poursuites contre 
                        une femme Blin, en 1894, et de l'affaire 
                        Mouroux, 
                        en 1897, la cour d'Appel d'Angers acquitta les prévenus, 
                        parce qu'ils n'avaient donné aucun traitement 
                        et ne s'étaient livrés, sur les malades, 
                        à aucune opération chirurgicale. De sorte 
                        que ces juges pensent qu'il n'y a traitement d'une maladie 
                        que lorsqu'il y a remise de drogues, ou d'opération 
                        chirurgicale. Cette interprétation est erronée. 
                        D'après la définition donnée par 
                        Littré, le mot traitement "se dit des moyens 
                        physiques ou moraux employés pour guérir, 
                        atténuer ou abréger une maladie". 
                        Hors le magnétisme semble bien rentrer dans le 
                        cadre des traitements moraux. L'arrêt 
                        rendu par la Cour d'Appel d'Angers, concernant Mouroux, 
                        fut cassé par la Cour de Cassation, et le Tribunal 
                        de Rennes, devant lequel il reparu, le condamna. Depuis 
                        cette époque, les magnétiseurs se sont 
                        efforcés d'intéresser le Parlement à 
                        leur cause, et ils arrivent à dire qu'interdire   1 note du 
                        CFDRM : le 19 ventôse de l'an XI correspond au 
                        Cerfeuil du 9 mars 
                        de la onzième année du calendrier républicain 
                        en vigueur de 1789 à 1805, en effet à 
                        chaque jour avait été octroyé un 
                        nom de plante. En voir la liste
 (page 17)
 aux masseurs et 
                        aux magnétiseurs l'exercice de leurs facultés 
                        curatives serait synonyme de l'interdiction de 
                        la liberté de penser, ce qui est manifestement 
                        exagéré.
 D'autre 
                        part, les études que font les magnétiseurs 
                        sont tellement insignifiantes que ce serait prendre 
                        une lourde responsabilité que des les autoriser 
                        à exercer leur art soit-disant curatif. Le Dr. 
                        Barbanneau cite le cas d'une 
                        école de magnétisme dans laquelle on peut 
                        être admis sans avoir fait aucune étude 
                        préalable. Bien entendu, on paye 75 francs pour 
                        le cours et 25 francs pour l'examen ; la durée 
                        des études est de deux ans ; et il semble qu'il 
                        y ait des accommodements, car il est dit dans le programme 
                        : "Les """élèves inscrits 
                        ne seront pas tenus à suivre régulièrement 
                        les cours ; ils peuvent apprendre chez eux, au moyen 
                        de cours et de traités spéciaux contenant 
                        le programme des études, et venir seulement aux 
                        répétitions de la dernière quinzaine 
                        et même de venir qu'à l'examen." Le 
                        Dr. Barbanneau conclut que 
                        les médecins doivent demander le maintien de 
                        l'article 16 de la loi sur la médecine, tel qu'il 
                        est et tel que l'a interprété la Cour 
                        de Cassation.   Au 
                        sujet de cette communication, M. Cornet, avocat de Mlle 
                        Bar, la voyante de Saint-Quentin, qui a été 
                        poursuivie pour exercice illégale de la médecine, 
                        est venu exposer les faits de cette cause, qui a eu 
                        un retentissement considérable dans toute la 
                        région du Nord. Mlle Bar, endormie par son père, 
                        possède, paraît-il, la curieuse faculté 
                        de reconnaître, de voir au travers des tissus, 
                        les organes malades et de donner des traitements pour 
                        les maladies ainsi diagnostiquées. Au cour du 
                        procès, le Dr Magnin fut commis à l'effet 
                        d'examiner la voyante, et, suivant la demande du défenseur, 
                        pour expérimenter sur des malades la faculté 
                        spéciale de Mlle Bar. Le Dr Magnin, qui, au Congrès, 
                        est venu répondre à M. cornet, a examiné 
                        Mlle Bar et a reconnu qu'elle présentait au plus 
                        haut degré tous les signes carac- 4e série _ Tome VI. _ 1906. N°1.(page 18)
 téristiques de la 
                        grande hystérie ; elle été très 
                        facilement hypnotisable ; son sommeil provoqué 
                        était réel. Il s'agissait donc simplement 
                        d'une jeune fille hystérique, dont la maladie 
                        était exploitée par son père, qui 
                        abusait avec sa complicité, de la crédulité 
                        publique.  En ce qui concerne les expériences 
                        à faire auprès des malades, le Dr Magnin 
                        c'est absolument refusé à les reprendre, 
                        ne voulant pas, dit-il, dans une affaire sérieuse, 
                        jouer un rôle absolument ridicule, et, d'autre 
                        part, parce que l'expérience ne pouvait rien 
                        prouver. Nous n'entrerons pas dans de plus grands détails 
                        et nous n'insisterons pas sur le rôle d'un médecin, 
                        qui, entreprenant seul des expériences 
                        sur Mlle Bar est venu au Tribunal présenter les 
                        résultats d'une contre-expertise infirmant les 
                        conclusions du rapport du Dr Magnin. Des expériences 
                        faites dans ces conditions, le médecin seul avec 
                        la malade n'ont aucune valeur. Mais c'est l'habitude 
                        de ce médecin d'opérer ainsi ; il ne peut 
                        jamais pratiquer des expériences dont-il annonce 
                        les résultats devant un tiers, car la présence 
                        d'une tierce personne compromet l'expérience 
                        ; il paraît que les fluides émanant du 
                        spectateur portent le bouleversement dans les fluides 
                        émanant de l'opérateur du sujet en expérience.
 Le 
                        Dr Magnin a montrer que les médications soi-disant 
                        thérapeutiques de cette femme n'ont pas toujours 
                        été sans danger ; enfin il a ajouté 
                        que le père de Mlle Bar encourait une lourde 
                        responsabilité, si plus tard sa fille présentait 
                        des troubles cérébraux occasionnés 
                        ou augmentés par ces séances hypnotique. Exercice 
                        illégal par les personnalités laïques 
                        ou religieuses dans un but de charité 
                        (1). _ La question est assez délicate ; avant 
                        1892, la question été réglée 
                        par un arrêt du Conseil d'État du 8 vendémiaire², 
                        an XIV, qui disait que les ministres du culte "n'avaient 
                        rien à craindre (1) Bruno-Dubron, Des 
                        faits reprochables d'exercice illégale de la 
                        médecine commis par des personnalités 
                        laïques ou religieuses dans un but ou sous prétexte 
                        de charité.
 ² 
                        note du CFDRM : le 8 vendémiaire de l'an 
                        XIV correspond au 29 septembre de la seizième 
                        année du calendrier républicain en vigueur 
                        de 1789 à 1805 et porte le nom d'Amaranthe, 
                        en effet à chaque jour avait été 
                        octroyé un nom de plante. En voir la liste
 
 (page 19)
 (des poursuites 
                        de ceux qui exercent l'art de guérir ou du ministère 
                        public chargé du maintien des règlements, 
                        puisqu'en donnant seulement des conseils et des soins 
                        gratuits ils ne font que ce qui est permis à 
                        la bienfaisance et à la charité de tous 
                        les citoyens, ce que nulle loi ne défend, ce 
                        que la morale conseille, ce que l'administration provoque 
                        et qu'il n'est besoin, pour assurer la tranquillité 
                        des curés et de desservants, d'aucune censure 
                        particulière". Sous l'empire de la loi de 
                        ventôse, les poursuites étaient donc absolument 
                        impossibles au grand dommage des malades. Dans le département 
                        du Morbihan, a rapporté le Pr Brouardel, 
                        on compte environ cent cinquante pharmacies illégalement 
                        tenues par des soeurs. Que s'est-il produit ? Les malades 
                        ne sont plus venus cherchés le médecin, 
                        tous sont allés à la pharmacie religieuse.
 Ceux 
                        qui n'avaient rien ou peu de choses ont été 
                        guéris ; les autres, plus gravement atteint, 
                        ne se sont rendus à la consultation médicale 
                        que trop tard pour être guéri ; les autres, 
                        plus gravement atteints encore, ne se sont plus rendus 
                        à la consultation du médecin que trop 
                        tard pour pouvoir être sauvé d'une affection 
                        qui aurait pu être bénigne, si elle avait 
                        été prise au début. Les docteurs, 
                        voyant leurs consultants diminuer de jour en jour, quittèrent 
                        le pays, de sorte, ajoute le Pr Brouardel, qu'une 
                        épidémie de choléra étant 
                        survenue il fut très difficile de prendre les 
                        mesures sanitaires nécessaire à cause 
                        du manque de médecins. Dans 
                        une de ces sortes de cliniques gratuites du Morbihan, 
                        une soeur se trompa de médicament, et la potion 
                        qu'elle fit absorber à six petits enfants atteints 
                        de mal de gorge entraîna la mort de quatre d'entre 
                        eux. Aujourd'hui 
                        c'est faits sont devenus beaucoup plus rares, et, si 
                        la loi ne permet pas des poursuites contre la personne 
                        qui donne d'urgence des soins à un malade, elles 
                        peuvent être engagées dès que le 
                        délit d'habitude est constaté. Le 
                        Dr Dangou (de Nice) rapporte le fait suivant : "Le 
                        desservant d'un petit village du midi est considéré 
                        comme   (page 
                        20)un guérisseur de premier ordre 
                        ; hors, voici dans quelles conditions s'était 
                        manifesté pour la première fois ce don 
                        surnaturel. Une de ces paroissienne était un 
                        jour venue le trouver, lui disant que son âne 
                        refusait de rentrer dans son écurie. Le desservant, 
                        sans doute fort embarrassé, dit à cette 
                        femme qu'elle retourne chez elle et qu'il allait faire 
                        le nécessaire. La femme, arrivée à 
                        sa maison, trouve son âne revenu à des 
                        meilleurs sentiments, dans son écurie. Avoir 
                        vaincu à distance la résistance d'un âne 
                        sembla merveilleux ; le desservant fut sacré 
                        grand homme, et, depuis, on vient de loin, lui demander 
                        conseils et consultations." On ne peut dire que 
                        ces conseilles sont désintéressés, 
                        car, dans bien des cas, si le malade ne paye pas toujours 
                        en argent les soins qui lui sont donnés, il les 
                        paye en nature, et un congressiste a rapporté 
                        le cas d'un desservant qui, chaque semaine, fait vendre 
                        au marché toutes les denrées que lui rapporte 
                        la pratique de l'exercice illégal de la médecine.
   Exercice 
                        illégal par les membres des sociétés 
                        de secours aux malades et aux blessés (1). 
                        _ Les sociétés don't le but est de porter 
                        secours aux blessés et aux malades sont en nombre 
                        considérable ; leur but humanitaire est des plus 
                        louable. Les 
                        unes restreignent leur action à secourir les 
                        blessé de terre et de mer et à venir en 
                        aide aux victimes de calamités publiques. Les 
                        autres secours les malades et les blessés de 
                        la rue, des promenades, de l'atelier, de l'usine, les 
                        asphyxiés, les noyés. Les premières 
                        constituent la Croix Rouge Française. 
                        Elles comprennent, par ordre d'ancienneté : la 
                        Société de secours aux blessés 
                        militaires des armées de terre et de mer 
                        fondée en 1864 ; l'Association des Dames françaises 
                        (secours aux militaires blessés ou aux malades 
                        en cas de guerre, secours aux civils en cas de calamité 
                        publique et de désastres), fondée en 1879 
                        ; enfin l'Union des femmes de France. Dans 
                        le second groupe, se trouvent les diverses sociétés 
                        de sauvetage : la Société française 
                        de sauvetage, fondée en 1879, avec ses(1) Rapport du Dr Dignat.
   (page 
                        21)nombreuses sections à Paris 
                        et dans les départements ; la Société 
                        nationale de sauvetage, fondée en 1887 ; 
                        la Société des secouristes français 
                        ou Infirmiers volontaires, fondée en 1892 
                        ; l'Association des Ambulanciers de France, fondée 
                        en 1896 ; la Société des Hospitaliers 
                        sauveteurs ; la Société polytechnique 
                        de sauvetage etc. La plus part de ces sociétés 
                        se divisent en sections et sous-sections. Presque toutes 
                        sont reconnues d'utilité publique ; presque toutes 
                        aussi reçoivent de l'Etat des encouragements, 
                        justifier par la nécessité qu'il y a de 
                        développer les idées de dévoûments 
                        et d'abnégation.
   Ces 
                        sociétés sont fort utiles et fort recommandables 
                        ; la seule chose que l'on peut leur reprocher c'est 
                        que l'enseignement qui est donné aux personnes 
                        qui en font partie, au lieu de rester circonscrit dans 
                        les limites qu'il conviendrait de ne pas franchir, embrasse 
                        un camp beaucoup trop vaste. C'est ainsi que, dans le 
                        programme d'études d'une des trois associations 
                        de la Croix-Rouge, six leçons sont données 
                        sur les maladies du système nerveux, les maladies 
                        de la peau, de l'appareil digestif, de l'appareil respiratoire, 
                        etc. Il est à craindre que ces courts, qui s'adressent 
                        à des personnes qui n'ont pas été 
                        préparées à ce genre d'études, 
                        amènent les auditeurs à se persuader qu'ils 
                        possèdent de véritables connaissances 
                        médicales, de sorte que, au lieu de préparer 
                         de bons infirmiers et de bons gardes-malades, 
                        il est à craindre. Qu'on ne crée une foule 
                        de médicastres, 
                        dont la fausse science peut devenir très préjudiciable. A 
                        la suite de ce rapport, le Congrès émet 
                        un voeu invitant les sociétés de secourt 
                        à mettre plus de circonspection dans l'établissement 
                        des programmes de leurs courts médicaux, qui 
                        ne devraient comprendre que l'enseignement des notions 
                        conforment aux rôles de ces auxiliaires éventuels 
                        du médecin.   Exercice 
                        illégal par les infirmiers, infirmières, 
                        gardes-malades, etc. (1) _ Le Dr Noir 
                        pense également queNoir, 
                        Exercice illégal par 
                        les infirmiers, infirmières, gardes-malades, 
                        etc.
 (page 22)
 les manuels destinés 
                        à l'éducation des infirmiers et gardes-malades 
                        ne répondent pas aux fonctions qu'ils sont appelés 
                        à remplir. Dr Noir signale un manuel des infirmières 
                        fort bien conçu, mais beaucoup trop développer 
                        :
 Il 
                        faut évidemment que l'infirmière sache 
                        que l'estomac n'est pas la poitrine, et à quel 
                        endroit se trouvent, le foie et les reins. Il faut qu'elle 
                        connaisse en quoi consistent les diverses fonctions, 
                        mais tout cela doit lui être sommairement exposé 
                        en quelques leçon. L'auteur du Manuel des 
                        Infirmières en juge autrement, il désire 
                        que l'infirmière connaisse le développement 
                        des os, les systèmes de Havers, 
                        le rôle des fibres de Sharpey, 
                        celui des nédullocelles et des ostéoblaste 
                        de Gegenbaur (page 23 du Manuel). 
                        Il ne sauraient passer sans rappeler aux infirmières 
                        que pour Virthow (de Berlin), 
                        la cellule osseuse est une cellule complète avec 
                        membrane ; que Renvier (de Paris) 
                        en fait une masse protoplasmique pourvue d'un noyau, 
                        tandis que Renaut (de Lyon) l'assimile 
                        aux cellules plates du tissu conjonctif (page 25). Tournons 
                        les pages, arrivons au coeur : l'infirmière, 
                        en parcourant son manuel, apprendra que, si l'on représente 
                        par 10 la durée d'une révolution cardiaque, 
                        la systole de l'oreillette rapide représente 
                        les 2/10 de la durée, celle du ventricule les 
                        6/10, tandis que la diastole ou repos du ventricule 
                        n'est que de 2/10 (pages 295 et 296). Si nous arrivons 
                        au système nerveux, nous y trouverons exposés 
                        les localisations cérébrales, les dégénérescences 
                        et la loi de Waller, les centres 
                        psychomoteurs, etc. Le 
                        deuxième volume intitulé Petite Chirurgie, 
                        Pansements Bandages, est conçu dans le même 
                        esprit. Le rôle des microbes y est parfaitement 
                        résumé avec figures à l'appui. 
                        L'infirmière qui apprendra que le staphylocoque 
                        doré se colore bien par le violet de gentiane 
                        et prend il Gram, il est surtout aérobie, qu'il 
                        pullule bien à 37 et 38°, germe sur la gélatine 
                        Peptone en plaques ou en tubes en quarante-huit heures 
                        ( pages 14 et 15) ; elles sauront que Gabriel Roux 
                        et Rodet ont affirmé la ressemblance 
                        du Bacillus Typhosus avec le colibacille d'Escherich. Plus loi, elles pourront 
                        lire le diagnostic de l'eczéma, qui relève 
                        de la thérapeutique analeptique et reconstituante 
                        et se convaincre que le professeur Hardy, 
                        Colson de Beauvais a conseillé 
                        l'emploi de la toile en caoutchouc dans le traitement 
                        des dermatoses.   Tout 
                        cela n'est point nécessaire à l'infirmière 
                        qui a un rôle extrêmement utile, indispensable, 
                        mais très limité ; elle est l'aide du 
                        médecin, dont elle doit suivre les prescriptions(page 23)
 avec une obéissance passive.
 
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