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Étude clinique et expérimentale sur le massage,
Par
A. Castex
1
ère partie
(2ère partie, cliquez ici)

- Liste complète des livres saisis


 
La première partie de cette étude de 1892 présente les effets physiologique que le massage a sur les différentes pathologies humaines. Quelques allusions sont faites à ce que traitera plus en profondeur la deuxième à savoir les essais qui furent pratiqués sur des animaux tels que chiens ou lapins.

Récapitulatif
Pour ceux que cette lecture n'intéresse pas forcément dans son intégralité, Castex explique les différentes incidences du massage au vu de ses constats au quotidien au sien d'un hôpital mais aussi les observations faites par d'illustres observateurs comme par des ses collègues.

A noter.
Re-transcription bénévole de : Etude clinique et expérimentale sur le massage, par Lucette Mosnier et Alain Cabello-Mosnier de Clermont-Ferrand, Juin 2008, au bénéfice du pôle Recherche du CFDRM.
(Ces travaux de retranscription ont été effectués afin de rendre plus aisément exploitable des données qui sont souvent numérisées, rendant leur exploitation malaisée. Ce document se trouve également numérisée par le site Bium. Nous signalons que hormis quelques fautes qui peuvent toujours se glisser dans la copie, le texte est très exactement restitué et libre de droit.

Liste des personnes mentionnées dans ce texte
Vulpian, Charcot, Le Fort, Valtat, Guyon, Féré, Deroche, Mezger, J. Luca Championnière, Bouilly, Le Dentu, P. Raymond, Onanoff, Starke, Gassner, Korner, Panas, Léon Petit ; Albert Reibmayr ; Nélaton, Bonnet, Verneuil, Desault, P. Berger, Hennequin, Richet.

 

 

ÉTUDE CLINIQUE ET EXPÉRIMENTAL SUR LES MASSAGES

Par A. Castex.

Le massage, après avoir longtemps méconnu, cesse enfin d'être comme un procédé simplement empirique et sans indications précises. Il devient scientifique et prend place à côté l'hydrothérapie et de l'électrothérapie dont il se montre souvent l'indispensable auxiliaire. Depuis que la technique de cette méthode s'est pourvue de manoeuvres variées, nous voyons son application s'étendre à bon nombre affections chirurgicales et médicales avec grands avantages.

C'est dire que les bons effet de la massothérapie se montrent de plus en plus nombreux.

La méthode n'est pas née d'hier cependant. Il en est fait mention dans les documents de la plus haute antiquité, dans le Cong-Fou et le Tao-Tsé des Chinois, dans le Yadour-Veda des Indiens. Hippocrate recommande le massage dans les affections articulaires. Il lui reconnaît la propriété de rendre la souplesse aux articulations rigides et la force à celles qui sont faibles. A Athènes, comme à Rome, le massage d'un fréquent usage. Au sortir du bain, dans les thermes, des esclaves frictionnaient méthodiquement le corps. Les gladiateurs y recouraient pour assouplir leurs muscles avant la lutte et après pour faire disparaître les ecchimoses. L'emploi du massage qui avait pris assez d'extension en europe au retour des croisades fut abandonné peu à peu. C'est en vain que notre Ambroise Paré y insistait à nouveau. Il faut arriver jusqu'aux contemporains, Bonnet (de Lyon) et Nélaton, pour voir ses bons effets reconnus et prônés. Dans
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ces dernières années Mezger d'Amsterdam et ses élèves ont contribué largement à la vulgarisation de la méthode.

A J. Luca Championnière (1) revient le mérite d'avoir montré quels résultats favorables à le massage et la mobilisation apportent dans le traitement des fractures voisines des articulations.

Comme le déclare très justement Schreiber (de Vienne), auteur d'un traité pratique de massage, pas n'est besoin pour y recourir d'avoir longtemps pratiqué sous la direction d'un spécialiste. Tout médecin suffisamment pénétré des modes d'action de la méthodes et de notions physiologiques, peut entreprendre seul l'éducation de sa main et obtenir des succès.

Voici déjà quelque temps que, depuis mon clinicat à l'Hôtel-Dieu, je me suis appliqué à recourir au massage dans les diverses circonstances où il me semblait utilisable. Bien que le total de mes observations ne soit pas considérable, elles m'ont paru avoir leur enseignement, surtout quand j'ai mis en parallèle celles qui sont de même ordre. Comme tous ceux qui ont étudié de près les effets du massage, j'ai constaté ses heureux résultats et surtout la rapidité de son action, sans parler des autres. Il ressort même de mes observations certaines déductions qu'il m'a paru intéressant de consigner. De là m'est venu l'idée d'écrire sur la massothérapie pour ajouter quelques documents à ceux déjà nombreux qu'on trouve dans la littérature médicale.

J'exposerai d'abord les fais dans leur classement naturel avec la technique spéciale de massage et les résultats dans l'espèce. Dans une deuxième partie toute expérimentale, je relate les résultats que m'a donné le massage sur les animaux. C'est en effet un des côtés les moins étudiés de la question. C'est celui pourtant qui nous éclaire sur le mode d'action de la méthode, la rend scientifique et nous guide dans les applications variées.

(1) J. Luca Championnière. Le massage et la mobilisation dans le traitement des fracture. Paris 1889.

 

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Les observations que j'ai pu recueillir se répartissent naturellement en cinq catégories principales. Ce sont : 1° des contusions, parmi lesquelles il importe de distinguer celles qui portent sur le un segment d'un membre, assez loin d'une jointure, et celles bien autrement importantes qui atteignent une articulation ; 2° des entorses (colonne cervicale, tibio-tarsienne, poignet, genou) ; 3° deux luxations de l'épaule dont une grave qui m'ont paru, la réduction assurée, devoir être rapidement améliorées dans leur suite par un massage méthodique et de fait le résultat a confirmé mes prévisions ; 4° des fractures dont les unes ont pu être massées dès le début du traitement et les autres, plus graves, après un certain temps réservé à l'emploi de l'appareil plâtré ; 5° enfin des atrophies musculaires d'origines diverses. C'est ici, comme on le verra par les détails, que cette méthode se montre inférieure. Elle agit sans doute pour assouplir les roideurs qui accompagnent fatalement l'atrophie musculaire, mais elle ne m'a pas paru rendre aux membres le diamètre qu'ils ont perdu. La mensuration le prouve.

 

I. Contusions.

1° Ce n'est pas uniquement pour aller du simple au composé que j'étudie les effets du massage sur une région contusionnée, mais aussi parce que les résultats que j'ai pu constater sont moins connus que les autres affections de nature traumatique.

On nous dit bien que les lutteurs du cirque faisaient frictionner vigoureusement leurs bosses sanguines. Ce n'est pourtant pas sans beaucoup de circonspection que j'ai livré pour la première fois les étreintes du masseur la partie gonflée et violacée par une contusion récente. Ne fallait-il pas craindre que les frictions et le pétrissage ne fissent qu'augmenter l'importance des liaisons ? L'événement m'a prouvé que ces craintes n'étaient pas fondées.

C'était un homme de 57 ans qui avait eu le membre supérieur gauche violemment contusionné par des coups de pied
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de cheval. Aucune plaie cependant. Pas la moindre fracture. L'infiltration sanguine occupait les deux tiers supérieurs de l'avant-bras et le bras presque en entier. Le membre était lourd et impotent. Les manipulations adoptées sur des frictions ascendantes en commençant par le haut du bras, pour ce conformer à la règle qui recommande de masser tout d'abord le voisinage de la lésion pour faire le vide dans les vaisseaux qui recevront ensuite les extravasations situées en amont. Le malade avait gardait le repos au lit pendant quatre jours après lesquels fut appliqué le massage. En vingt-quatre heures l'amélioration était marquée. Les douleurs avaient disparu. Cette rapide disparition des douleurs est un des bénéfices les plus évident du massage. Dès le lendemain aussi le gonflement était moindre, la coloration violette moins intense, les mouvements plus aisés. Bref, après trois séances de massage, pratiquées en trois jours, cet homme revenait à ses occupations fatigantes.

Loin d'accroître les lésions d'une contusion, on en réduira donc les conséquences au minimum en frictionnant selon les règles la région intéressée. Il ne saurait y avoir similitude entre le résulta d'un heur violent, brusque et limité par une partie de notre corps et ces frictions, ces pressions ménagées, larges qui s'exercent dans le sens de la circulation veineuse. Les unes sont le correctif de l'autre. Elles refoulent progressivement dans les voies circulatoires les éléments que la contusion en a fait brusquement sortir.

Le résultat sera d'autant plus marqué que la massothérapie aura été plus vite appliquée et plus largement employée. J'ai pu voir en effet sur un autre malade qui avait eu le mollet fortement contusionné, la région des malléoles rester gonflée et douloureuse assez longtemps parce que les manipulations avaient trop exclusivement porté sur le mollet seulement.

Trois ou quatre séances suffisent, dans les cas moyens, pour rendre à la région une grande partie de sa souplesse.

2° La contusion qui atteint une jointure doit être envisagée à part. Elle détermine un degré d'arthrite généralement faible mais dont les conséquences peuvent êtres hors de proportion
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avec le peu d'importance de la lésion articulaire. Je fais principalement allusion à ces atrophies musculaires rapides qui frappent de préférence les muscles extenseurs et entraînent une impotence fonctionnelle grave que dans maintes circonstances le pronostic n'avait pas prévues.

La contusion articulaire peut encore provoquer l'apparition de contractures dans les muscles voisins, surtout si le sujet est plus ou moins hystérique. Il n'est pas rare, par exemple, d'observer la contracture du biceps à la suite d'une contusion du coude et, pour ma part, j'ai vu déjà deux fois dans les services de MM. les professeurs Verneuil et Guyon deux jeunes sujets qui, à la suite d'une chute sur le menton, sans fracture d'aucune sorte, présentaient une contracture rebelle des masséters. Elle était incomplète. Les dents pouvaient être desserrées quelque peu, et la mastication était fort gênée. Aucun de ces deux sujets n'était pourtant hystérique.

Une autre conséquence de la contusion des jointures est la parésie des masses musculaires survenant aussitôt après le traumatisme. Mais la lecture des observations conduit à penser que dans ces cas il s'agit plutôt de la contusion des troncs nerveux qui cheminent dans le voisinage. Dans un article donné dans la France médicale en 1885 (1), j'ai étudié ces paralysies consécutives à la contusion du plexus branchial au-dessus du moignon de l'épaule. Bouilly (2) avait déjà signalé les conséquence de la contusion du nerf sciatique, consistant surtout en atrophies musculaires et je trouve dans mes notes les quelques lignes suivantes sur une maladie que j'ai vu en 1883 à l'hôpital Lariboisière, dans le service du professeur Duplay. "Troubles trophiques du membre inférieur gauche après contusion et névralgie consécutive du nerf sciatique. Femme de 30 ans, amyotophies à jambe, pieds bot équin acquis et rétraction de l'aponévrose plantaire". Je n'insiste pas sur l'insuffisance des détails.


(1) Castex. Monoplégie trauamtique du membre supérieur. France Méd, juillet 1885.
(2) Boully.
Arch. géner. de médecine, déc. 1880


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Justement une des observations que j'ai recueillies en vue de cette étude se rapporte à ces parésies traumatiques.

Homme de 40 ans. A reçu une caisse pesamment chargée entre la base du cou et le sommet de l'épaule, sous la région sous-claviculaire droite. Parésie de tout le membre supérieur correspondant, imputable à la contusion indirecte du plexus brachial. Les mouvements d'extension étaient surtout affaiblis. En huit séances de massage tous les muscles eurent récupérés leur énergie. Tout le traitement ne dura que treize jours. Le blessé ne présentait pas de stigmates hystériques.

Je laisse de côté les résultats divers de la contusion des jointures pour insister particulièrement sur les atrophies musculaires consécutives aux contusions de la hanche. C'est vraiment là le point intéressant de la question et son importance dans la pratique n'est pas encore suffisamment signalée dans les livres.

C'est dans le service du professeur Le Dentu, à l'hôpital Saint-Louis, que j'ai vu le cas pour la première fois. Un homme était tombé sur son grand trochanter, ne s'était pas fait de fractures, mais une amyotrophie rapide était survenue dans tout le membre inférieur qui en faisait un infirme pour une simple contusion de la hanche.

Ce fait me conduisit à revoir l'étude intéressante que MM. Guyon et Féré ont consacré à " l'atrophie musculaire consécutive à quelques traumatismes de la hanche" (1). Les auteurs y ont consigné des faits de contusion trochantérienne, d'entorses légères de l'articulation coxo-fémorale, jugées de prime abord comme de peu d'importance puis suivies à court délai d'atrophie musculaire et d'importance marquée du membre inférieur. L'atrophie porte principalement sur les fessiers, la fesse est aplatie et flasque, sur les muscles de la cuisse, le droit antérieur et les adducteurs sont surtout atteints. La jambe elle-même présent à la mensuration une circonférence moindre que sa congénère. Le pied se porte en dehors, les malades ne peuvent se mettre au


(1) Guyon et Féré. - Progrès méd., 2 avril 1881.


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lit sans soulever leur genou avec leurs deux mains et pour longtemps ils sont condamnés aux béquilles.

Il se passe à l'épaule ce qui se passe à la hanche, et là, le deltoïde s'atrophie comme ici les fessiers. Dans sa thèse inaugurale, Valtat (1) (obs. IX) cite un fait d'atrophie du deltoïde survenu en huit jours chez une jeune femme de 23 ans, à la suite d'une chute sur le coude qui avait déterminé un peu d'arthrite dans l'épaule. Le deltoïde était réduit à une couche tellement mince, et le moignon de l'épaule à ce point déformé, qu'on avait cru à une luxation de l'épaule.

Conclusion : en présence d'un traumatisme articulaire même léger, réserver beaucoup son pronostic surtout s'il s'agit de la hanche, car peuvent survenir à courte échéance des amyotrophies rebelles qui pour le blessé ne sont pas moins graves qu'une fracture ou une arthrite.

On a beaucoup discuter sur la physiologie pathologique de ces atrophies d'origines musculaires. Je ne reviendrai pas sur ces diverses hypothèses qui ont été proposées. La plus probable et la plus acceptée est celle de l'atrophie de l'action réflexe. Le traumatisme détermine un léger degré d'arthrite, les nerfs articulaires sont irrités, l'irritation se transmet à la moelle, les centres médullaires affectés agissent à leur tour sur les nerfs centrifuges musculaire qui déterminent à leur terminaisons des lésions dégénératives.

Cette théorie qu'acceptait Vulpian, qu'adoptait MM. Charcot, Le Fort et Valtat, Guyon et Féré. Dans sa thèse récente, M. Deroche (2) relatent de très récentes expériences personnelles qui mettent dans tout son jour le bien fondé de cette théorie.

Il a répété sept fois, toujours avec des résultats identiques des expériences qui avaient été pratiquées pour la première fois au Collège de France, par MM. P. Raymond et Onanoff.


(1) Valtat. De l'atrophie musculaire consécutive aux maladies des articulations. Paris 1977.
(2) Deroche. Amyotrophie réflexe d'origine articulaire. Th. Paris, 1890.

 

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Sur des chiens et des lapins il sectionne les racines postérieures des trois dernières paires lombaires à gauche. Quelques jours après, quand la cicatrisation est obtenue, il s'assure que l'anesthésie est complète dans le membre inférieur gauche, depuis l'aine jusqu'au-dessous du genou, que par conséquent les irritations portées sur cette zone ne seront pas transmise à la moelle. Il détermine alors une arthrite traumatique à droite et à gauche en plongeant une pointe de thermocautère dans les deux genoux. L'animal ne traduit aucune douleur à gauche. Trois mois après il est sacrifié par une section du bulbe. Dans les deux genoux existent les lésions de l'arthrite, mais les muscles de la cuisses sont normaux à gauche, atrophiés à droite.

M. Deroche constate une différence en moins de 6 à 7 gr. pour 40 gr. de muscle. L'examen microscopique des muscles atrophiés et de l'axe médullaire montre que pour les premiers la différence de volumes semble tenir à la diminution de la substance interfibrillaire et que pour la moelle il y a dégénération ascendante du côté gauche dans les cordons postérieurs.

Cette expérience démontre avec évidence que les amyotrophies d'origine articulaire sont d'ordre réflexe.

La cure des atrophies réflexes est difficile à obtenir. On ne doit rien attendre des moyens médicaux (ergot de seigle, strychnine). C'est l'électrothérapie qui, de l'avis générale, offre encore le plus de ressources. On a le choix entre :

1° L'électricité statique (l'étincelle paraît être un moyen très actif pour la nutrition du muscle) ;

2° Les courants continus (galvaniques) que le Pr Le Fort recommande d'employer faible et permanent ;

3° Enfin les courants d'induction (faradiques) appliqués sur le nerf ou sur les muscles.

Valat, avec son maitre, le professeur Le Fort, recommande surtout de combiner les courants continus et induits. Onimus pratique une séance tous les 2 jours, d'un quart heure chacune. Pendant les cinq premières minutes il emploie les courants continus puis pendant cinq autres minutes les cou-
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 rants induits avec quelques secousses pour revenir au courant continu pendant les cinq dernières minutes.

Mais qu'on ne s'illusionne pas sur l'efficacité du traitement. Le Pr Charco nous dit : "en présence d'une amyotrophie articulaire, quand même elle aurait été déterminée par une lésion banale, ne pas porter un pronosotic trop favorable. La maladie sera longue à peu près nécessairement quoi qu'on en fasse".

C'est pourquoi on ne saurait trop s'ingénier à prévenir une telle complication. Il y a surtout lieu de lutter de vitesse avec le mal par tous les moyens thérapeutiques dont nous disposons. Les fais que j'ai pu observer me conduisent à penser que le massage méthodique (frictions, pétrissage, tapotement) employé dès le début, aussitôt après l'accident arrête en partie ce mouvement d'atrophie plus rebel à réparer ensuite. Qu'on se reporte à l'observation personnelle que je cite plus haut. On y verra que huit séances de massage ont suffi à tout le membre supérieur son énergie fonctionnelle, notamment aux extenseurs qui sont d'ordinaire le plus atteints dans ce genre de traumatisme.

Le massage agit pour prévenir les atrophies, en entretenant dans le muscle un mouvement que la moelle est momentanément incapable de lui apporter. De la même façon il éveille la fibre musculaire de la parésie où le traumatisme l'a plongée. On comprend ainsi comment la gymnastique de la région atteinte, les mouvements provoqués, les douches sont des adjuvants très utiles du massage. Celui-ci a paru très efficace aussi pour résoudre les contractures, qui suivent parfois les contusions articulaires.

J'insiste encore sur cette condition que pour être efficace le massage doit être appliqué dès le début et prévenir les lésions qu'il est destiné à combattre. Sinon, son rôle me paraît bien douteux. C'est ce que je me propose de montrer quand j'examinerai son employ dans les atrophies.

Un des rares inconvénient du massage consiste en une éruption discrète de petites papules dont la durée est éphémère. encore ne l'observe-t-on qu'à titre exceptionnel.

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Conclusion : le massage hâtif constitue à côté de l'électricité et des mouvements provoqués un moyen très utile pour prévenir les fâcheux effets de la contusion des jointures.

 

II. Entorses.

Ce qu'on peut écrire d'inédit dans les entorses se trouve aujourd'hui bien restreint. C'est contre cette affection qu'il a été le plus employé, dès le début, quand il n'était encore qu'une série de passes empiriques, et si le traitement des foulures est longtemps resté aux mains des rebouteurs c'est que les médecins se sont trop tardivement rendu compte de la sédation que leurs manoeuvres procuraient aux malades. Aujourd'hui le massage s'impose comme le correctif presque indispensable de l'entorse. En Allemagne l'autorité militaire exige de ses médecins un rapport semestriel sur les résultats du massage, et les statistiques que Starke, Gassner, Korner nous ont fait connaître mettent en évidences les résultats rapides de la méthode, et par conséquent l'économie de temps qu'elle réalise chez le soldat.

Malgré la multiplicité des études récentes sur cette application spéciale de la massothérapie, elle ne s'est guère enrichie de procédés nouveaux, et l'excellent article du professeur Panas sur l'entorse (1) indique ne substance toute la technique de la méthode.

Pour ma part j'ai fait masser surtout des entorses du pied puis quelques autres du poignet, du cou et du genou.

Au pied, les manoeuvres doivent être dirigées de bas en haut et éviter les saillies osseuses. Elles réussiront d'autant mieux qu'il s'agit de ces entorses dites périphériques dans lesquelles la violence a surtout tiraillé les parties molles, ligaments compris, qui sont superposées autour des extrémités articulaires.

Même configuration à l'égard du poignet.

J'ai vu deux fois une entorse du coup chez des hommes qui


(1) Article "Entorse". Dre de médecine et de chirurgie pratiques.
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avaient reçu un fardeau pesant sur la tête. Les vertèbres n'étaient pas douloureuses au palper, mais tous les muscles du cou étaient enroidis surtout le trapèze. Les malades souffraient vivement. Trois ou quatre séances de massage suffirent pour dissiper la douleur et la contracture musculaire. Les passes étaient faites avec le talon des deux mains en allant de l'omoplate vers l'occiput. Je doute qu'un autre traitement eût pu rendre ces hommes à leurs travaux de force.

Résultat rapide aussi dans les tiraillements ligamenteux qu'on observe au genou et qui arrêtent le malade plutôt par la douleur que par la lésion matérielle.

C'est donc surtout par la rapidité de son action que se distingue le massage appliqué aux entorses. Je peux citer à l'appui de cette remarque le cas d'un de mes amis qui venait un matin chez moi vers midi pour me montrer un gonflement considérable d'un de ses poignets survenu quelques instants avant, à la suite d'une chute sur le talon de sa main. Par un examen méthodique je pus m'assurer qu'il n'y avait pas fracture, et je lui donnais le conseil de se faire masser au plus vite. Dès le lendemain les douleurs avaient disparu et le lendemain, à ma grande surprise, et, malgré mes appréhensions, il s'asseyait au piano et se servait de sa main comme si de rien n'était. Trois séances de quarante-huit heures avaient suffi pour rendre à son articulation violemment entorsée son fonctionnement normal. Calmer les contractures musculaires réflexes et les douleurs, surtout celles qui résultent des tiraillements des ligaments, permettre par là même la reprise des mouvements, telles sont les résultats immédiats que j'ai personnellement constatés.

Le massage réussit encore très bien contre les suites éloignées de l'accident que le professeur Panas englobe sous le nom d'entorse chronique (empâtement du membre, relâchement des liens articulaires et roideurs).

Un complément des plus utiles après les frictions et refoulement est la mobilisation méthodique et mesurée de la jointure. Elle ne serait contre-indiquée que si la gravité du cas
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faisait redouter les complications inflammatoires. Sinon, et dans les entorses périphériques qui sont le triomphe de ces manoeuvres, l'exercice de l'articulation provoqué par le chirurgien suivant les mouvements physiologiques, entretient la souplesse des muscles et prévient des douleurs qui pourrait occasionner la reprise des fonctions articulaires.

Très efficaces aussi comme moyen auxiliaire, les manuluves ou pédiluves à l'eau salée aussi chaude que le malade peut la supporter. Ici, comme ailleurs, l'eau chaude se montre plus active que l'eau froide qui a été longtemps le remède habituel des danseuses.

En établissant la moyenne de ces observations au point de vue de la durée du traitement, je trouve trois jours et demi (3/2) ce qui revient à trois ou quatre séances de massage pour chaque entorse. Aucun de ces cas particuliers ne s'écarte de la moyenne. J'ai cru devoir mettre à part un fait d'entorse grave tibio-tarsienne central qui n'exigea pas moins de vingt-huit séances. Elles montrent bien quelles différences séparent les divers degré de l'entorse.

 

III. Luxations 

Après que les surfaces articulaires ont été replacées dans leur rapport normal et la jointure immobilisée quelques jours dans un bandage afin d'éviter les complications, un ensemble de moyens thérapeutiques doivent être employés pour parfaire la guérison et, parmi ces moyens, le massage est de première importance.

Son emploi n'est pas nouveau dans les roideurs qui persistent après la levée des appareils, dans les luxations anciennes qu'il s'agit de réduire pour préparer et faciliter les ruptures sous chloroforme qui conduisent souvent à des réductions inespérées. J'ai décris ces manoeuvres d'après les pratiques de mon maitre, M. le professeur Richet, dans la Revue de chirurgie en 1888 (1).


(1) A. Castex. De la rupture des adhérences dans les luxations anciennes de l'épaule Revue de chirurgie octobre 1888
          T 167

(Page 290)

On n'y a moins habituellement recours au début du traitement, immédiatement après une immobilisation que, dans les cas simples, il sera avantageux de faire aussi courte que possible. Les divers auteurs passent rapidement sur cette indication du massage, bien qu'elle fût connue des anciennes. Les résultats obtenus dans l'espèce sont à rapprocher de ceux que le massage et la mobilisation assure dans les fractures simples et juxta-articulaires. Il sont susceptibles des mêmes explications.

J'ai peu appliquer le massage dans deux cas de luxation de l'épaule assez différents. Voici les observations résumées, avec les détails techniques :

Homme 47 ans, robuste. Luxation sous-coracoïdienne de l'épaule droite par contusion directe le 18 février 1890 : réduction avec le chloroforme le lendemain. Immobilisation. Trois jours après j'examine à nouveau l'épaule. Il n'y a pas d'arthrite. Sur la partie antérieure du bras se voit une ecchymose foncée qui s'étend à toute la moitié antérieure du bras et semble due à une contusion directe. Le membre pend à peu près inerte le long du thorax, et le malade n'arrive qu'à grand'peine à ébaucher le mouvement d'abduction. Première séance de massage le 22 février suivit de séances quotidiennes, elles ne sont que fort peu douloureuses. Dès la 3e, plus de sensibilité. L'ecchymose est étalée et beaucoup moins foncée. Dès la 7e séance, elle a totalement disparue. Le massage s'adresse dès lors plus particulièrement aux muscles périarticulaires (grand pectoral, grand dorsal, deltoïde surtout). les divers mouvements s'améliorent rapidement, seul le mouvement d'adduction reste difficile. A partir du 2 mars, le massage semblait n'avoir plus rien à donner ; j'applique les courants continus et le 9 mars, mon malade pouvait s'habiller et se déshabiller seul. Chaque séance de massage ou d'électricité était suivie de mouvements provoqués que je faisais dans toutes les directions physiologiques, ne s'arrêtant que lorsque la douleur exprimée par la malade était intolérable.

Le 9 mars quelques douleurs avaient reparu dans la jointure et comme, d'après le malade, la massage lui donnait plus de
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souplesse et de force que l'électricité, on y revint. Quatre jours après (séances quotidiennes) les douleurs étaient totalement dissipées et le malade se déclarait guéri. Son mouvement d'abduction était incomplet encore, mais il en était si peu gêné qu'il cessait tout traitement et revenait à ses occupations. La cure avait durée vingt-trois jours.

Mon deuxième malade était un homme de 45 ans environ, robuste aussi, auprès duquel je fus appelé au commencement de la nuit. Il avait glissé en marchant dans sa chambre et tombant sur le talon de la main gauche, s'était fait une luxation grave de l'épaule correspondante. après un examen prolongé que le gonflement rendait difficile, j'arrivai à conclure qu'il y avait luxation sous-coracoïdienne avec fracture de l'humérus au niveau du col chirurgical. Le malade présentait entres autres signes celui sur lequel insistait M. Berger dans un article de la France médicale (1) : "Possibilité de rapprocher le coude du tronc". Après quelques essais infructueux de réduction j'administrais le chloroforme pour procéder au refoulement direct de la tête humérale que j'avais vu heureusement réussir entre les mains de M. Richet. Tout fut inutile et craignant d'augmenter encore les lésions, notamment de blesser l'artères avec les dentelures que pouvait présenter le col de la tête fracturée, j'arrêtais les manoeuvres, non sans les avoir variées et réitérées.

Le membre put être placé et immobilisé dans un bandage de Desault simplifié, le bras vertical au contact de la poitrine, et j'attendis, en ayant soin de dire qu'il y aurait peut-être d'intervenir encore ultérieurement.

Cependant il ne survint aucune complication. Les douleurs cessèrent peu à peu. Je défaisais le bandage deux fois par semaine pour examiner l'articulation et lui imprimer de légers mouvements. La tête humérale restait hors de la cavité glénoïde, immédiatement en dedans d'elle. Une dépression


 (1) P. Berger. Luxations de l'épaule compliquées de fracture de l'extrémité supérieure de l'humérus, 1884.
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sous-acromiale marquait l'absence de la tête, mais hormis la palpation, rien ne révélait les altérations profondes.

Comme la tête luxée ne déterminait aucune compression dangereuse, ni sur les vaisseaux, ni sur les nerfs, je pensai que le mieux était de rendre à l'épaule le maximum possible de ses mouvements et que, puisque surtout il s'agissait du membre gauche, la gêne fonctionnelle arrivait à être minime.

Quinze jours après l'accident, la région traumatisée fut soumise au massage. Les manoeuvres s'adressèrent aux doigts qui étaient faibles et engourdis. A l'avant-bras, au bras, aux muscles des régions pectorale et dorsale une vaste ecchymose existait sur le bras et le grand pectoral qui fut résorbée en une huitaine de séances quotidiennes. Les frictions firent également disparaître un gonflement mollasse qui occupait la région sous-claviculaire. Chaque séance de massage était suivit de mouvements passifs qui, douloureux d'abord, devinrent indolores à la sixième séance.

Bref, pars quinze jours de massage et trente jours de traitement, mon malade élevait son coude à 45 degrés d'abduction, portait sa main sur sa tête, derrière son dos et s'habillait seul. Son muscle deltoïde était médiocrement atrophié. Je doute que toute autre conduite eût amené des résultats plus satisfaisants, vu la gravité du cas.

Si je rapproche ces deux faits pour examiner quels moyens techniques ont assuré les résultats rapides, j'y vois que les frictions doivent être employées pour les premières séances, qu'il faut, plus tard, y associer les pétrissages. Les maoeuvres ne seront pas limitées à l'épaule seule, mais s'exerceront sur le membre entier, à commencer par les doits, les mains, et ainsi de suite. autour de l'épaule, elles s'adresseront surtout au deltoïde, généralement le plus atteint dans toutes les affections de l'articulation scapulo-huméral. Elles agiront séparément sur ces trois parties principales. Comme pour le grand péctoral et le grand dossal, les frictions doivent être pratiquées avec le talon de la main, parallèlement et à la direction des fibres musculaires, c'est-à-dire en montant toujours
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 vers l'acromion. Quelques tapotements sont utiles à la fin des séances pour éveiller la contractilité des fibres musculaires et les sens musculaires, après que les fictions ont dégagé ces fibres des exsudats qui les encombres.

Les mouvements passifs et actifs doivent compléter la séance. N'agissent-ils pas, eux aussi, comme une sorte de massage ? A l'épaule, les mouvements passifs feront le mouvements en avant (flexion), le mouvement en arrière (extension), l'abduction, l'adduction, la cicumduction, la rotation, poussés par le chirurgien jusqu'au point où le patient éprouve des douleurs par trop fortes.

Comme mouvements actifs, le malade doit porter la main à sa bouche, sur sa tête, c'est classique. Un moyen qui m'a semblait très pratique pour récupérer l'abduction, et de dire au malade de placer sa main sur le dos d'une chaise et de s'en éloigner petit à petit jusqu'à ce que le mouvement, devenant plus actif, il puisse l'éloigner au contraire de son corps, puis enfin la soulever.

Courants continus et interrompus, Bains de Barèges, douches chaudes, traitement thermal, etc. , reste encore ici le complément très utile du massage.

Dans les deux luxations, où je croix avoir eu à me louer beaucoup de la massothérapie, elle me paraît avoir agi en réduisant au plus vite le gonflement et les ecchymoses, en dissipant du même coup les douleurs (elle a suffi pour en venir à bout quand elles ont reparu tardivement chez mon premier malade); en éveillant la fibre musculaire de cette stupeur locale où la plonge le traumatisme d'ou elle glisse à l'atrophie, enfin, en prévenant les indurations et roideurs, qui, sur le tard, enchaînent les mouvements de l'articulation.

Je me sens affermi dans mes conclusions par les lignes suivantes, que je trouve dans un intéressant article que M. Hennequin dans la revue de chirurgie (1). Leur portée ne peut être douteuse à quiconque a vu avec quelle compétence et quels soins notre confrère examine une luxation.


 (1) Hennequin. revue de chirurgie 10 janvier 1890.
(Page 294)

"Une pratique qui tend à se généraliser et que j'approve sans réserve, consiste à soumettre l'articulation à un massage régulier de cinq à dix minutes avant d'imprimer des mouvements. Le massage a le grand avantage de réveiller la vitalité et la contraction des muscles de hâter la résorption des épanchements en les disséminant sur une large surface, d'assouplir les tissus, de diminuer la sensibilité et la douleur, de hâter le retour des fonctions régulières des organes, de permettre d'imprimer plus étendus aux surfaces articulaires, de prévenir la réaction et la prolifération des tissus fibreux péri-articulaires et du tissus intra-musclaire.

Le massage devra précédé les mouvements passifs... etc."

 

IV. FRACTURES.

C'est aux fractures sans gravité comme celles du radius et du péroné que j'ai d'abord appliquer le massage pour l'étendre ensuite à divers cas, fractures ou autres lésions. Les résultats que j'avais pu constater dans le service de L.-Champonnière, et son étude sur "Le massage et la mobilisation dans le traitement des fractures" me rendaient très désireux de les constater et les obtenir par moi-même.

Avant de conclure, je dois exposer ce que j'ai observé. Mais, à l'avance, je puis dire qu'avec tous ceux qui ont systématiquement adopté le massage, j'ai été frappé de ce fait général très important : rapidité des résultats.

Je l'ai principalement étudié dans les fractures du radius et du péroné, _elles sont si fréquentes_, et dans quelques autres encore (cubitus, olécrane, jambes, cuisses, col du fémur).

On peut envisager ces bénéfices dans deux conditions différentes, suivant qu'il est employé au début du traitement ou seulement après la suppression de l'appareil plâtré. Je l'envisagerai dans la première surtout, car c'est là qu'il donne son plus grand profit.

A. fractures de l'extrémité inférieur du radius. _ Il y aurait avantage, au point de vu du pronostic et des indica-
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tions thérapeutiques, d'adopter pour les fractures la division si utile ailleurs : cas légers, moyens, grave.

1° Le cas Leger, c'est celui d'une personne d'âge adulte qui tombe la main en avant et vient se plaindre d'une douleur vague au poignet, dont il lui est impossible de se servir. L'examen révèle un léger gonflement au dos du poignet, pas d'entorses, pas de déformation du squelette, mais un point excessivement douloureux sur le radius, à 1 ou 2 centimètres au-dessus du sommet de l'apophyse styloïde. La fracture est ainsi manifeste, mais combien bénigne. Elle eû pu passé inaperçue sans grand dommage pour le malade. Ce n'est qu'un léger tassement de l'extrémité inférieure de l'os. Un appareil plâtré serait bien inutile ici. Le mieux est alors d'avoir recourt au massage. Frictions légères centripètes sur toute la périphérie du poignet en évitant le foyer de la fracture dans les premières séances. Un peu d'ouate, une bande roulée et la main dans une écharpe dans l'intervale des séances quotidiennes ; il n'en faut pas davantage pour que la main récupère en dix ou douze jours, ces mouvements essentiels.

2 ° Les cas moyens sont ceux où le gonflement est plus marqué, l'apophyse styloïde raccourcie, l'artuculation plus ou moins entorsée et le dos de fourchette visible. Ici encore, rien de mieux que le massage pour réduire promptement et douleurs et gonflements. Les frictions doivent agir sur les doigts d'abord qui sont roides ou gonflés, puis sur le dos de la main, autour de la fracture, sur la masse des épicondyliens et des épitrochléens, même sur le bras. On entretient ainsi les agents actifs de la pronation et de la supination. Il m'a paru très important, que, pendant les séances, la main et le poignet du malade soit calés et bien d'aplomb sur une table car la moindre secousse retentit douloureusement. Chaque séance sera suivit de mouvements passifs imprimés aux doigts et surtout aux poignets. Un petit appareil ouaté suffit dans l'interval des séances en y insérant au besoin une plaquette de carton sur le côté antérieur du poignet pour le soutenir.

Le massage étant chose nouvelle pour les fractures, le ma-
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lade n'est pas sans méfiance à son égard. Il reconnaît volontiers que les douleurs et le gonflement ont promptement cédé, mais il se préoccupe de la forme des os, se demandant si son cal sera correcte, alors qu'on ne place pas l'appareil comme à tant d'autres dont il entend parler. Ce serait faire du tors à la méthode, je crois, que de ne pas tenir compte de ses craintes. Si pendant les intervales des séances on met au malade un appareil simple (ouate, deux attelles en bois ou carton, bandes de toiles),  non seulement on dissipe ses appréhensions, mais encore on prévient les déjettements du raduis et de la main qui peuvent insensiblement se produire. De sorte que, pour ces cas d'importance moyenne, l'appareil ne dois pas être rejeté à la condition d'être défait chaque jour pour le massage.

3° Enfin il est des cas graves (d'une façon relative) où tous les signes de la fracture du radius à son extrémité inférieure sont nettement accusés, y compris le dos de fourchette. Ils ne vont pas sans entorses plus ou moins intense du poignet. Le traumatisme s'augmente encore de la nécessité de réduire assez violemment la fracture. Ici pas de doute possible sur le l'opportunité d'une appareil temporaire, avec séances de massage et de mobilisation une fois par jour. Dans un de ces cas, chez un homme d'une soixantaine d'année, j'ai vu un gonflement des plus rebelles limité aux doigts et à la main qui disparaissait exactement au niveaux de la fracture. Il ne gardait que faiblement l'emprunte du pouce et cependant il ne pouvait être expliqué que par une compression veineuse dû à la déformation du squelette. Le massage quoique prolongé n'y fit absolument rien. Il fallut pendant une quinzaine de jours comprimer très énergiquement sous la ouate la main entière. Le gonflement fut réduit de la sorte, mais la main resta à l'état de battoir. Des mouvements passifs et des bains d'eau salée très chaudes en eurent raison.

La durée moyenne du traitement dans mes observations se trouve être de 15 jours, mais il ne s'agit que de cas légers ou moyens. La supériorité du massage n'est donc pas contestable quand on réfléchit qu'avec l'appareil plâtré il faut une ving
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taine de jours d'immobilisation puis autant à peu près des conséquences de l'appareil. Je trouve dans mes notes une observation qui peut servir de contrôle, et montre l'infériorité de l'appareil.

Jeune homme de 28 ans. Fracture de l'extrémité inférieure du radius gauche, appareil plâtré pendant 22 jours,  quand on retire l'appareil la mains est encore gonflée, il y a 2 cent. en moins de circonférence à l'avant-bras du côté malade. Les masses musculaires y sont notablement plus molles. Le malade ne peut ni serrer une main, ni soulever une chaise, ni ouvrir une porte, ni faire le mouvement d'opposition du pouce au petit doigts. Il est pourtant jeune et non rhumtisant. Il fallut encore une dizaine de séances de massage, des bains d'eau chaude salé et surtout des courants continus pour rendre à peu près ses fonctions à cette main. En tout 56 jours de traitement. Lorsque après une dizaine de séances en moyen le malade n'a plus de douleur, il peut commencer la série suivante d'exercices : serrer la main, tenir un journal, opposer le pouce aux autres doigts, puis soulever une chaise, ouvrir une porte. Dès que ce dernier résultat est obtenu, la guérison est acquise, quelques rares malades réclament ensuite trois ou quatre séances supplémentaire parce qu'un peu de douleur a persisté qui cède vide à cette courte reprise des frictions méthodiques.

 

B. fractures de l'extrémité inférieur du péroné. - Je n'envisage également pas, ici, les cas sans gravité auxquels cependant il est encore assez d'usage d'appliquer un appareil silicaté. Le résultat du massage est rapide aussi et mes chiffres concordent avec ceux de L.-Champonnière qui nous dit qu'après la troisième semaine la cure est terminée. En comparant de faits analogues je vois que pour le deuxième l'ensemble du traitement, sans l'appareil, a duré 17 jours, et pour le premier le traitement consécutif à pris strictement le même temps. Mais il faut y ajouter 30 jours d'appareil. 47 jours au lieu de 17 voilà la proportion. Encore
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puis-je affirmer que le deuxième malade après les 17 jours avait sa jambe dans un état autrement satisfaisant que le premier après les 47 jours.

Le résultat est toujours rapide chez les ouvriers courageux hâtés de revenir à leur travail qui souvent ignorent même que leur péroné est fracturé.

Je me rappelle d'ailleurs avoir entendu un de mes maitres dans les hôpitaux faire ce diagnostique préalable. " Cet homme est-il venu à pieds à l'hôpital ? C'est une fracture du péroné. S'est-il fait porté ? C'est une entorse" et dans la grande majorité des cas l'examen vérifiait le diagnostique.

Dans les fractures du péroné le massage m'a paru surtout utile non seulement pour réduire douleur, ecchymoses et gonflement, mais encore pour restituer aux articulations de la région leur souplesse physiologique. Grâce à lui le malade peut assez promptement appuyer sur son talon antérieur et s'élever en portant sur cette partie du pieds. Tant que cette condition n'est pas réalisée, la marche reste fort gênée.

 

C. Fractures divers. - dans quelques autres cas de fracture que j'ai pu suivre,  trop peu nombreux pour conduire à des conclusions générales, voici comment j'ai vu le massage agir.

Pour une fracture complexe du coude, où le diagnostique était resté incomplet ; par le dégorgement, l'assouplissement qu'amenèrent les frictions au sortir de l'appareil, il devint évidement que l'extrémité inférieur de l'humérus avait été déformée, que les os de l'avant-bras venaient buter dans la flexion contre un cal difforme qu'il était illusoire de vouloir outrepasser la demi-flexion. on voit ici l'utilité du massage pour l'achèvement du diagnostique et du pronostic. Il a montré ce qui était définitif dans la lésion.

Pour la jambe, il hâte notablement la reprise des fonctions dès que l'appareil est enlevé. Six séances suffisent en moyenne.

Dans les fractures de cuisse, il assouplit toutes les articulations, quand l'immobilisation est terminée, il s'agit de même sur les muscles de la cuisse, leur donne de la sûreté et dis-
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sipe les oedèmes qui, chez les gens âgés, peuvent persister autour des malléoles.

D'une façon générale, s'il est prudemment employé dans les fractures, le massage se montrera inoffensif toujours, utile très souvent.

V. ATROPHIES.

Après avoir apporté de nouveaux documents à l'actif du massage et montré combien son utilisation est précieuse pour la rapidité des résultats, j'arrive à reconnaître le côté faible de la méthode. Au fur et à mesure que je dépouillais mes observations, j'étais de plus en plus frappé d'y trouver cette mention souvent reproduite : "n'a rien fait contre l'atrophie".

Voici par exemple un homme de 38 ans qui, à la suite d'une fracture du col du fémur, présente une amyotrophie de la cuisse gauche telle qu'à la circonférence elle mesure 4 centimètres en moins qu'à droite. Après 11 séances de massage (frictions, pétrissage, tapotements) le membre est assoupli, mais l'atrophie persiste au même degré.

Je recours alors aux courants continus qui apportent plus de force aux muscle. Un femme après une fracture du péroné droit a 4 centimètre d'atrophie (en circonférence). Dix séances de massage. Après la sixième la malade se trouve beaucoup mieux, la marche devient facile, mais après la dixième, le mollet n'a pas repris même un demi-centimètre.

Enfin une femme de 33 ans se contusionne fortement la hanche gauche dans une chute de voiture. Quand je la vois, trois semaines après l'accident, elle boite parce que, dit-elle, elle sent son membre inférieur gauche plus faible que l'autre. Rien au squelette d'ailleurs. La cuisse gauche a dans sa circonférence 3 centimètre de moins que la droite. L'atrophie est encore plus marquée sur les muscles fessiers et dessine un creux très accentué au-dessus du grand trochanter gauche. le massage n'a rien pu contre cette atrophie. Je pourrais citer un plus grand nombre d'échec. La plu-
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part se rapportent à des fractures où le massage n'a été appliqué que tardivement. Elles peuvent être rapides et graves les amyotrophie des fractures. J'ai dans mes recueils l'observation d'une fracture du cubitus mise dans un appareil silicaté et suivie d'atrophie marquée non seulement à l'avant-bras, mais encore à la main et au bras.

Appliquée ainsi tardivement aux segments de membre atrophiés, la massothérapie ne peut que les assouplir, mais elle les laisse grêle et partant sans forces. C'est alors que l'électrothérapie lui vient en aide pour donner plus d'énergie aux contractions musculaires.

Comme pour atténuer ce que je viens de dire, je vois aussi que dans mes observations il n'est pas fait mention des insuccès du massage que lorsqu'il a été consécutif, par exemple après la levée d'un appareil. Serait-ce que le massage précoce primitif réduirait les atrophies rebelles en s'opposant à leur apparition ? J'aurais tendance à la croire d'après ce que j'ai vu pour les deux luxations de l'épaule.

Cette conclusion est confirmée par les résultats que m'a donnés le massage immédiat dans les luxations expérimentales dont il est question dans la 2° partie de cette étude.

Donc, contre les amyotrophie le massage tardif est sans action, le massage précoce seul rendrait des services.

Albert Reibmayr (de Vienne)(1) nous dit : "On obtient par le massage des résultats complets dans l'atrophie musculaire, à la condition qu'elle ne soit pas due à une affection médulaire".

Cette réserve vient à l'appui de ma conclusion puisque, nous l'avons vu, l'expérimentation et histologie démontrent que la moelle est presque toujours en cause dans les amyotrophie.

 

VII. CONSTIPATION.*

 Au court de mes essais multiplié de massothérapie j'ai été conduit à l'utiliser avec le plus rapide succès contre un cas de constipation rebelle.


 (1)  Le massage par le médecin Dr Léon Petit Fiche technique.
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M. X., d'une quarantaine d'année et d'un tempérament nerveux, me communiquait un jour son inquiétude au sujet d'une rétention fécale habituelle. Depuis une vingtaine d'année il n'allait à la garde-robe que tous les 7 ou 8 jours en moyenne et fort peu chaque fois. Cette difficulté dont il ne s'inquiété guère d'abord, avait fini par obséder son moral d'autant qu'elle entraînait des céphalalgies et des anorexies répétées. au milieu de ses occupations l'idée de sa quasi-infirmité lui revenait sans cesse et sa physionomie comme son langage, lorsqu'il m'en parla, disaient sa vive et longue contrariété. Je renonce à faire la longue énumération des spécialités qu'il avait employées.

Je lui donnai le conseil de renoncer à tous les purgatifs pour essayer du massage. voici comment procédait le masseur dont je dirigeais moi-même les manoeuvres.

Le malade étendu dans son lit les jambes relevées, la vessie vidée les mains actionnèrent successivement les divers groupe musculaire de la paroi abdominale. D'abord des frictions verticales ascendantes et descendantes sur les droits antérieurs, ensuite des passes obliques suivant la direction des fibres du grand oblique, puis transversales pour les petits obliques et transverses.

Le malade se plaçait ensuite sur le ventre et les mains du masseur malaxaient vigoureusement les muscles sacro-lombaires. Après ce traitement de la paroi contractile celui de l'intestin même. Les  deux mains du masseur descendaient alors, poings fermés, du caecum vers le rectum, en suivant le cous des côlons et plongeaient tout particulièrement dans la fosse iliaque gauche pour propulser les matières alvines. La séance durait ainsi un quart d'heure, composée, on le voit, de pressions excitantes et sur les muscles pariétaux et sur les fibres intestinales même. Dès le lendemain de la première séance, au matin, mon malade se présentait à la garde-robe pour un succès complet. Les séances furent continuées quotidiennement et presque tous les matins. Aussi, plus ou moins, le malade exonérait son
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 rectum. Alors plus de maux de tête, un excellent appétit, une quiétude d'esprit retrouvait.

Les séances ont été répétées 20 fois, puis continuées pendant 20 autres jours à raison de 2 fois par semaine.

Je dois dire que ma confiance dans le massage ne m'avait pas fait négliger l'emploi simultané des douches et d'un régime approprié. Dans ces applications variées le massage est en effet puissamment secondé par les douches, l'électricité, etc. mais sans lui ces moyens auxiliaires perdraient beaucoup de leur effets. Il est l'agent principale, le premier à mettre en oeuvre dans cette série d'intervention externe.

Mes lectures m'ont ultérieurement appris que Ling, Lainé et Reibmayr procédaient d'une manière assez analogue, agissant successivement sur les muscles de la paroi et sur ceux du tube digestif.

 

 * Le chapitre VI est manquant.

 

 

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